Régime méditerranéen versus régime végan

Rogerson, D., Maças, D., Milner, M., Liu, Y. and Klonizakis, M. (2018) Contrasting effects of short-term Mediterranean and vegan diets on microvascular function and cholesterol in younger adults: a comparative pilot study. Nutrients 10, 1897; doi:10.3390/nu10121897

(voir l'abstract et le texte entier ici)

Les auteurs britanniques [Sheffield, Comté du Yorkshire, Royaume-Uni] cherchent à savoir si, après quatre semaines de suivi, un régime méditerranéen et un régime végan exercent, ou non, les mêmes effets, entre autres sur la fonction microvasculaire, la concentration du sérum en cholestérol total et le poids corporel.

Ils recrutent 24 sujets [18 femmes, 6 hommes,], volontaires, d’âge compris entre 18 et 35 ans. Pendant 4 semaines, 12 d’entre eux [10 femmes, 2 hommes] suivent un régime méditerranéen, les 12 autres [8 femmes, 4 hommes] un régime végan.

De nombreuses données biologiques, dont la conductance vasculaire cutanée [CVC], la concentration sérique en cholestérol total et le poids corporel, sont mesurées aux jours J1 et J28. De même, les renseignements obtenus par des interrogatoires aux jours J1 et J28 permettent d’évaluer les quantités de macro- et micro-nutriments consommés par les sujets des deux groupes.

Si l’on se réfère aux quantités de légumes et de fruits consommés par les sujets des deux groupes, on obtient les chiffres moyens suivants, en g j-1:

 

Régime méditerranéen Visite 1

Régime méditerranéen Visite 2

Régime végan

Visite 1

Régime végan

Visite 2

Légumes

165

263

132

279

Fruits

18

188

121

401

Les auteurs constatent:

- chez les sujets ayant suivi le régime méditerranéen, une amélioration significative de la conductance vasculaire cutanée, mesurée par fluxmétrie laser doppler [Dietary changes reflected improvements in plateau raw cutaneous vascular conductance in the Mediterranean Diet group (p=0.05)],

- chez les sujets ayant suivi le régime végan, une diminution significative à la fois de la concentration sérique en cholestérol total et du poids corporel [Dietary changes reflected […] a reduction in total cholesterol (p=0.045) and weight loss (p=0.047) in the Vegan Diet group].

Ainsi, selon les auteurs britanniques, les deux régimes, le régime méditerranéen comme le régime végan, seraient en mesure d’exercer des effets bénéfiques cardiovasculaires. L’effet bénéfique cardiovasculaire du régime méditerranéen serait, peut-être, plus prononcé que celui du régime vegan, le premier pouvant contenir plus de légumes riches en nitrate NO3-. D’où, alors, une meilleure biodisponibilité en oxyde nitrique NO et un plus fort effet vasodilatateur [Although both diets might offer cardiovascular diseases risk-reduction benefits, evidence for the Mediterranean Diet appeared to be stronger due to changes in vasodilatory ability and NO bioavailability].

Les auteurs britanniques sont conscients des limites méthodologiques de leur étude. Ils signalent le manque de randomisation, le faible échantillonnage, la répartition inégale des sexes des participants, la courte durée des régimes. Ils considèrent que leur étude n’est qu’une étude pilote, destinée principalement à encourager la mise en œuvre d’autres recherches dans ce domaine.

Commentaire du blog

Dans cette étude, la quantité moyenne de légumes consommée globalement par les sujets soumis au régime méditerranéen ne semble, en réalité, pas plus importante que celle  consommée par les sujets soumis au régime végan. Il aurait été intéressant de connaître les réelles quantités globales de nitrate NO3- ingérée quotidiennement par les sujets des deux groupes.

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Substances entravant l’action anti-hypertensive des ions nitrate et nitrite

Oliveira-Paula, G.H., Pinheiro, L.C. and Tanus-Santos, J.E. (2019) Mechanisms impairing blood pressure responses to nitrite and nitrate. Nitric Oxide 85, 35-43

(voir l'abstract ici)

Affection multifactorielle, l’hypertension artérielle est associée à une diminution de la synthèse endogène en oxyde nitrique NO, ainsi qu’à une diminution de sa biodisponibilité [Hypertension is a multifactorial disease associated with impaired nitric oxide (NO) production and bioavailability]. L’action anti-hypertensive des ions nitrate NO3- et nitrite NO2- ne fait plus de doute [There is no doubt that nitrite and nitrate exert antihypertensive effects].

Après avoir rappelé l’existence du cycle entéro-salivaire des nitrates, les auteurs brésiliens [Université de Sao Paulo] passent en revue les différents agents pouvant atténuer l’action anti-hypertensive des ions nitrate NO3- et nitrite NO2-, et expliquent les mécanismes mis en jeu.

Les différents facteurs en cause sont les suivants:

- légumes riches en glucosinolates,

- consommation de tabac,

- bains de bouche antiseptiques,

- inhibiteurs de la pompe à protons,

- acide ascorbique à forte dose,

- inhibiteurs de la xanthine oxydase.

Légumes riches en glucosinolates

Autrefois dénommés thioglucosides, les glucosinolates associent un glucose à un groupe sulfate. Certains légumes, tels le chou, le chou-fleur et le brocoli, en sont assez riches. La myrosinase dont ils sont également pourvus a pour propriété de convertir durant la mastication les glucosinolates en thiocyanates. Les thiocyanates exercent alors vraisemblablement dans la cavité buccale une action inhibitrice à l’égard de la conversion des ions nitrate NO3- en ions nitrite NO2-, ce qui pourrait contribuer à atténuer l’action anti-hypertensive des apports alimentaires en nitrate NO3- [This mechanism is associated with impaired conversion of nitrate into nitrite in the oral cavity, thus attenuating the blood pressure  responses to nitrate]

Consommation de tabac

La fumée de cigarette contient des ions cyanure CN-. A la suite de réactions de transsulfuration catalysées par deux systèmes enzymatiques, la thiosulfate sulfotransférase [TST] et la 3-mercapto-pyruvate sulfurtransférase [MST], les ions cyanure sont transformés en ions thiocyanate SCN-. Il se pourrait que les ions thiocyanate SCN- dérivés de la fumée de cigarette diminuent la sécrétion active de nitrate par la glande salivaire. D’où une moindre formation de nitrite dans la cavité buccale et un moindre effet anti-hypertenseur de la consommation alimentaire en nitrate NO3- [It has been suggested that nitrate uptake by salivary glands is blunted by cigarette smoking-derived SCN-, resulting in decreased nitrate levels available to be reduced to nitrite, thereby precluding the hypotensive responses to nitrate].

Bains de bouche antiseptiques

La conversion des nitrates NO3- salivaires en nitrites NO2- salivaires dans la cavité buccale sous l’effet des bactéries nitrato-réductrices est diminuée, voire abolie, par certains bains de bouche antiseptiques. D’où une diminution de la concentration en nitrite NO2- salivaire et une diminution de l’effet anti-hypertenseur de la consommation alimentaire en nitrates NO3- [Once nitrate is taken up by the salivary glands, it is converted into nitrite by nitrate-reducing bacteria in the oral cavity. This process is abolished by antiseptic mouthwash, which destroys those bacteria, leading to decreases in nitrite concentrations and counteracting the blood pressure-lowering effects of nitrate]. L’effet cardiovasculaire des bains de bouche antiseptiques est démontré à la fois par des études cliniques et des études expérimentales [The relevance of this effect to the cardiovascular health has been shown both in clinical and experimental studies].

Inhibiteurs de la pompe à protons [IPP]

Dans le milieu acide de l’estomac, la protonation de l’ion nitrite NO2- d’origine salivaire donne lieu à la formation intragastrique d’acide nitreux HNO2, lequel se décompose ensuite en oxyde nitrique NO et trioxyde de diazote N2O3, lui-même  à l’origine de S-nitrosothiols RSNO. Les S-nitrosothiols semblent être capables de maintenir la bioactivité de l’oxyde nitrique NO.

Les inhibiteurs de la pompe à protons [IPP] diminuent la sécrétion acide de l’estomac. Chez le rat sujet à une hypertension expérimentale des études ont montré que l’oméprazole diminue l’activité hypotensive de l’administration orale de nitrite NO2-, sans réduire celle de son administration intraveineuse. Il en est de même dans une étude clinique avec l’ésoméprazole [InexiumR].

Au cours de plusieurs études, on a d’ailleurs constaté que l’utilisation régulière par l’homme des inhibiteurs de la pompe à protons [IPP] se trouve associée à une augmentation à la fois du risque cardiovasculaire et de la dysfonction endothéliale.

Fortes doses d’acide ascorbique

Il a été montré que de faibles doses d’acide ascorbique augmentent la production des S-nitrosothiols RSNO provenant de l’ingestion de nitrites NO2-. Augmentant sans doute les quantités d’oxyde nitrique NO formées dans la lumière gastrique, elles renforcent ainsi l’effet anti-hypertenseur des nitrites ingérés [It was recently reported that low doses of ascorbate increase the production of S-nitrosothiols promoted by oral treatment with nitrite and improve the anti-hypertensive responses to this anion., probably due to greater amounts of nitrite-derived NO formed in the gastric lumen […]].

Par contre, de hautes doses d’acide ascorbique ont l’effet inverse. Elles sont associées à une diminution significative, dans l’estomac, des S-nitrosothiols RSNO provenant des nitrites NO2-, réduisant ainsi leur effet anti-hypertenseur [High concentrations of ascorbate have been shown to destroy RSNO, which leads to impaired antihypertensive responses to nitrite].

Inhibiteurs de la xanthine oxydase

Les ions nitrite NO2- qui échappent à la réduction intra-gastrique parviennent, une fois absorbés, dans la circulation générale. Ils sont ensuite convertis par la xanthine oxydase XO (ou xanthine oxydo-réductase XOR) en oxyde nitrique NO.

La xanthine oxydase catalyse, en fait, différentes réactions biochimiques: 1) Hypoxanthine → xanthine puis xanthine → acide urique. 2) Oxygène O2 → superoxyde O2.- et peroxyde d’hydrogène H2O2. 3) NO2 → NO.

En raison du rôle important de la xanthine oxydase dans la dégradation des purines, les inhibiteurs de la xanthine oxydase sont largement utilisés pour traiter la goutte et l’hyperuricémie: citons, par exemple, l’allopurinol [ZyloricR] et le fébuxostat [AdenuricR].

Mais le rôle de la xanthine oxydase dans la réaction NO2 → NO fait craindre que l’utilisation thérapeutique des inhibiteurs de la xanthine oxydase ait aussi pour inconvénient d’amoindrir les effets bénéfiques des ions nitrate NO3- et nitrite NO2- ingérés. Des études chez l’animal le suggèrent. Il reste à le vérifier chez l’homme [Taken together, these findings suggest that it is possible that the wide use of xanthine oxidoreductase inhibitors such as allopurinol and febuxostat may suppress the beneficial effects of nitrite and nitrate. Clinical studies are necessary to examine this possibility].

Commentaire du blog

- Les données actuelles de la littérature concluent en des modalités d’action différentes de l’ion thiocyanate SCN- sur le cycle entérosalivaire des nitrates, selon qu’il provient des légumes riches en glycosinolates ou de la fumée de cigarette. Pour les auteurs brésiliens, les concentrations plasmatiques et salivaires en thiocyanate seraient nettement plus élevées à l’occasion de l’exposition au tabac que lors de la simple consommation de légumes riches en glycosinolates; ce pourrait être l’explication. D’autres études sur le sujet sont souhaitables.

- L’action anti-hypotensive, ou anti-anti-hypertensive, de la fumée de cigarette, de certains bains de bouche antiseptiques et des inhibiteurs de la pompe à protons [IPP], exercée par le biais d’un effet négatif sur le cycle entéro-salivaire des nitrates, est bien étayée par diverses études chez l’homme. Si elle est vraisemblable, l’action anti-anti-hypertensive, chez l’homme, des légumes riches en glucosinolates, de la vitamine C à forte dose et des inhibiteurs de la xanthine oxydase mérite d’être encore confirmée.

- Il serait intéressant de mieux connaître les doses et durées d’administration des différents produits cités à partir desquelles les effets indésirables, anti-hypotenseurs ou anti-anti-hypertenseurs, se manifestent.

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Femme, consommation de nitrate, maladie coronarienne

Jackson, J.K., Zong, G., MacDonald-Wicks, L.K., Patterson, A.J., Willett, W.C., Rimm, E.B., Manson, J.E. and McEvoy, M.A. (2019) Dietary nitrate consumption and risk of coronary heart disease in women from the Nurses’ Health Study. British Journal of Nutrition. doi.org/10.1017/S0007114519000096

(voir l'abstract ici)

Pourvue d’un effet hypotensif, la consommation de légumes est bien connue pour ses propriétés bénéfiques dans le domaine vasculaire [The consumption of nitrate-rich vegetables can acutely lower blood pressure, and improve mediators shown to optimise vascular health]. Des études récentes ont montré que des apports importants et prolongés en nitrate NO3- sont significativement associés à une réduction de la mortalité cardiovasculaire [Recent observational evidence indicates that higher long-term habitual nitrate intakes are associated with a lower risk of cardiovascular disease mortality (Blekkenhorst et al, 2017; Liu et al., 2018)].

Les auteurs australiens [Université de Newcastle, Nouvelles-Galles du Sud, Australie] et américains [Université de Harvard, Boston, Massachusetts, Etats-Unis] se proposent de vérifier si, chez la femme, un lien existe ou non entre les apports en nitrate NO3- au long cours et l’incidence des maladies coronariennes.

Ils se servent de données recueillies dans le cadre de l’importante «Nurses’ Health Sudy». Débutant en 1986, l’étude, qui se termine en 2012, dure 26 ans. Elle porte sur 62535 femmes âgées de 30 à 55 ans, exemptes de diabète, de maladie cardiovasculaire et de cancer. Les apports alimentaires en nitrate NO3- sont évalués à l’aide de questionnaires répétés tous les quatre ans [Information on diet was updated every 4 years with validated food frequency questionnaires]. Au cours des 26 années de suivi, 2257 cas d’affections coronariennes sont recensés.

Au moment de l’analyse, les femmes ayant participé à l’étude sont réparties en cinq quintiles, depuis le groupe qui a consommé le moins de nitrate (en moyenne: < 86 mg NO3- j-1) jusqu’à celui qui en ont consommé le plus (en moyenne: > 195 mg NO3- j-1). Les résultats sont ensuite ajustés en fonction de facteurs susceptibles d’interférer tels le tabac, le poids et l’activité physique.

Variable

Quintile 1

< 86 mg j-1

Quintile 2

86-117

Quintile 3

118-150

Quintile 4

151-195

Quintile 5

>195 mg j-1

Valeur de p

Nombre de cas

493

440

419

465

450

 

Personnes-années

293249

294919

295097

295112

294658

 

Ajusté en fonction de l’âge

1 [Référence]

0.88

0.78

0.83

0.77

0.0002

Ajusté aussi en fonction du tabac, poids et activité physique

1

[Référence]

0.95

0.89

0.97

0.91

0.27

Du tableau ci-dessus il ressort qu’au cours des 26 années de l’étude, moins les femmes ont été amenées à consommer de nitrate NO3-, plus elles ont été exposées au risque d’apparition d’une maladie coronarienne. Plus elles en ont consommé, moins elles y ont été exposées. Mais il s’avère aussi que les femmes qui consomment les quantités les moins importantes de nitrates alimentaires NO3- sont aussi celles qui fument le plus et ont le moins d’activité physique, si bien que, chez la femme, la prise en considération des deux derniers éléments fait disparaître, semble-t-il, le lien statistiquement significatif entre la consommation alimentaire régulière en nitrate et la protection à l’égard des maladies coronariennes.

Commentaire du blog

L’ajustement qui tient compte de l’exposition au tabac, du poids et de l’activité physique fait ainsi disparaître, chez la femme, la liaison statistique négative existant entre la consommation alimentaire en nitrate NO3- et l’incidence des maladies coronariennes.

On remarquera cependant que les trois facteurs, l’exposition au tabac, la surcharge pondérale et la faible activité physique, ont justement pour caractéristique commune d’être, chacun, associés à une faible synthèse endogène en oxyde nitrique NO, nitrate NO3- et nitrite NO2-.

Donc, à supposer que, chez la femme, les apports exogènes en nitrate ne jouent pas isolément de rôle préventif à l’égard des maladies coronariennes, on ne pourra pas en dire autant de l’ensemble des sources, exogènes et endogènes, en oxyde nitrique NO, nitrate NO3- et nitrite NO2-.

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Nitrate alimentaire, alcool, tension artérielle

McDonagh, S.T., Wylie, L.J., Morgan, P.T., Vanhatalo, A. and Jones, A.M. (2018) A randomized controlled trial exploring the effects of different beverages consumed alongside a nitrate-rich meal on systemic blood pressure. Nutrition Health. Sous presse.

(voir l'abstract ici)

Les auteurs britanniques [Université d’Exeter] veulent savoir si l’effet hypotensif faisant suite à l’ingestion de nitrate NO3- se trouve  ou non modifié par l’ingestion concomitante d’une boisson alcoolisée, riche ou non en polyphénol [The pharmacokinetic response to the combined ingestion of NO3- and polyphenol-rich or low polyphenol alcoholic beverages is unknown].

Ils présentent une étude randomisée avec cross over. Douze hommes jeunes, âgés en moyenne de 25 ans, ingèrent:

- ou bien, à titre de contrôle, une salade pauvre en nitrate, contenant 42 mg de nitrate NO3-, et de l’eau [groupe CON],

- ou bien une salade verte, riche en nitrate, contenant 375 mg de nitrate NO3-, jointe à

- soit de l’eau [groupe NIT-CON],

- soit une dose de vin rouge, riche en polyphénol [groupe NIT-RW],

- soit une dose de vodka, pauvre en polyphénol [groupe NIT-A].

Les concentrations plasmatiques, salivaires et urinaires en nitrate NO3- et en nitrite NO2-, ainsi que les tensions artérielles sont contrôlées avant ingestion, puis régulièrement jusqu’à la cinquième heure.

A la cinquième heure, les concentrations plasmatiques, salivaires et urinaires en nitrate et en nitrite sont significativement plus importantes dans les groupes NIT-CON, NIT-RW et NIT-A que dans le groupe contrôle CON. La concentration plasmatique maximale en nitrite NO2- est évaluée

- à la première heure dans le groupe NIT-RW: en moyenne, à 13.4 mg NO2- l-1,

- à la deuxième heure dans les groupes:

- NIT-A: en moyenne, à 14.6 mg NO2- l-1,

- et NIT-CON: en moyenne à 16.8 mg NO2- l-1.

A la deuxième heure, par comparaison avec le groupe contrôle [CON], les tensions artérielles systoliques sont significativement diminuées,

- de 4 mm Hg en moyenne dans le groupe NIT-RW,

- de 3 mm Hg en moyenne dans le groupe NIT-A,

- de 2 mm Hg en moyenne dans le groupe NIT-CON (p<0.05).

De même, les tensions artérielles diastoliques et moyennes apparaissent significativement plus faibles dans les groupes NIT-RW et NIT-A que dans  groupe contrôle [CON] (p<0.05).

En conclusion, selon les auteurs britanniques, un repas riche en nitrate consommé avec ou sans boisson alcoolisée augmente la concentration plasmatique en nitrite NO2- dans les deux ou trois heures qui suivent, en même temps qu’il exerce son effet hypotensif [A NO3--rich meal, consumed with or without an alcoholic beverage, increases plasma [NO2-] and lowers systemic blood pressure for 2-3 h post ingestion].

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Apport en nitrate chez l’hypertendu

Zafeiridis, A., Triantafyllou, A., Papadopoulos, S., Koletsos, N., Touplikioti, P., Zafeiridis, A.S., Gkaliagkousi, E., Dipla, K. and Douma, S. (2018) Dietary nitrate improves muscle microvascular reactivity and lowers blood pressure at rest and during isometric exercise in untreated hypertensives. Microcirculation. Sous presse.

 

(voir l'abstract ici)

 

Les auteurs grecs [Thessalonique, Grèce] présentent une étude randomisée effectuée en double aveugle et cross over.

 

Dix-huit patients, âgés de 44 ans en moyenne, atteints d’hypertension artérielle non traitée, reçoivent sous forme randomisée:

- soit un jus de betterave riche en nitrate, apportant 340 mg de nitrate NO3- (groupe [nitrate])

-soit un jus de betterave déplété en nitrate (groupe [placebo])

 

La tension artérielle et la vitesse des ondes pulsatiles sont mesurées avant et après ingestion. Lors d’une manœuvre d’occlusion-reperfusion sont évaluées, en spectroscopie par proche infrarouge, les teneurs en oxyhémoglobine et hémoglobine totale. Les sujets sont également soumis à une épreuve musculaire (serrement de poing isométrique submaximal) suivie d’un enregistrement tensionnel.

 

• Lors de la reperfusion suivant l’occlusion artérielle, la ré-oxygénation sous forme d’oxyhémoglobine apparait plus prononcée dans le groupe [nitrate] que dans le groupe placebo] (p < 0.05). L’effet pourrait ainsi être consécutif à une amélioration de la réactivité microvasculaire […suggesting improved microvascular reactivity].

 

• La tension artérielle de repos et ambulatoire apparaît moins élevée dans le groupe [nitrate] que dans le groupe placebo] (p < 0.05).

 

• La vitesse des ondes pulsatiles n’apparait pas affectée par l’ingestion de nitrate.

 

• Durant le serrement de poing isométrique, la tension artérielle et la résistance périphérique apparaissent plus faibles dans le groupe [nitrate] que dans le groupe [placebo] (p < 0.01-0.05).

 

Ainsi, chez l’hypertendu non traité, un seul apport de 340 mg de nitrate NO3-, sous forme de jus de betterave, suffirait à entraîner:

- une réduction de courte durée de la tension artérielle, qu’elle soit de repos ou ambulatoire,

- une amélioration de courte durée de la fonction de la microvascularisation musculaire,

- enfin une atténuation de la tension artérielle et de la résistance périphérique lors de l’exercice isométrique.

 

[In drug-naïve hypertensives, a single-dose of BRJ induces (1) short-term reductions in resting/ambulatory-BP, (2) acute improvements in muscle microvascular function, and (3) attenuation in BP and peripheral resistance responses during isometric exercise].

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Méthémoglobinémie de l’adulte et lampe à lave

Funke, M.E., Fischetti, C.E., Rodino, A.M. and Shaheen, S.P. (2018) Methemoglobinemia induced by ingesting lava lamp contents. Clinical Practice and Cases in Emergency Medicine 2, 207-210

(voir l'abstract et le texte entier ici)

Objet décoratif, la lampe à lave est connue et commercialisée depuis les années 1960. Il s’agit habituellement  d’un globe de verre plus ou moins allongé contenant un liquide transparent au sein duquel évoluent des boules colorées de cire fondue.

Les auteurs américains [Université Duke, Durham, Caroline du Nord, USA] rapportent le cas d’un homme âgé de 71 ans, pesant 86 kg. Ses antécédents sont lourds: hypertension artérielle, néphropathie chronique, alcoolisme et démence. Il arrive au service des urgences de Durham en situation d’hypoxie, sa saturation en oxygène étant de 90 % (normale ≥ 96%). L’interrogatoire apprend qu’une demi-heure plus tôt, pensant à la présence d’alcool, le patient a ingéré environ la moitié du contenu d’une lampe à lave.

Six heures après l’arrivée à l’hôpital, la saturation en oxygène est encore faible: SaO2 = 85 %. La peau, notamment aux extrémités, est grise et marbrée. Un contrôle de sang veineux montre alors l’existence d’une méthémoglobinémie, dont témoigne un taux de méthémoglobine de 45.6 % (normale < 2 %).

Le traitement consiste alors en deux injections intraveineuses à vingt minutes d’intervalle de 50 mg de bleu de méthylène. Une demi-heure plus tard, la peau retrouve une couleur plus correcte; le taux de méthémoglobine devient moins élevé: 9 %.

Le Centre Antipoison étant sollicité, les praticiens apprennent que le contenu de la lampe à lave ingéré comprend 76 % de nitrate de calcium Ca(NO3)2, 1 % d’énol de potassium et 23 % d’eau.

Les auteurs américains considèrent que la méthémoglobinémie du patient est liée à la présence de nitrate de calcium Ca(NO3)2 dans le produit de la lampe à lave [We believe that the delay in his respiratory decompensation was likely secondary to delayed metabolism of calcium nitrates, producing levels significant enough to be clinically responsible for his methemoglobinemia symptoms].

Commentaire du blog

L’explication des auteurs est incomplète.

A lui tout seul, quelle que soit la quantité ingérée, l’ion nitrate NO3- n’est pas capable de déclencher une méthémoglobinémie.

L’ion nitrite NO2- peut, par contre, transformer l’hémoglobine du globule rouge en méthémoglobine.

- Chez le nouveau-né et le nourrisson âgé de moins de six mois, la méthémoglobine-réductase n’ayant pas encore atteint sa complète activité, des ions nitrite NO2- présents dans un biberon préparé avec une eau de puits bactériologiquement contaminée peuvent déclencher une méthémoglobinémie. Celle-ci est le plus souvent bénigne, guérissant sans séquelles. Des cas assez rares d’évolution fatale ont cependant été décrits. La prudence à leur sujet est donc de mise.

- Chez l’adulte, dont la méthémoglobine-réductase a atteint sa pleine activité, très peu de cas de méthémoglobinémie liés aux ions nitrite NO2- ont été décrits dans la littérature médicale. On sait, par exemple que l’injection intraveineuse de 560 mg de nitrite NO2-, sous forme de nitrite de sodium NaNO2, peut déclencher une méthémoglobinémie de 30 % à la soixantième minute (Kiese et Weger, 1969).

Dans le cas du patient décrit ici par les auteurs américains, il est logique d’envisager une possibilité: la lampe à lave incriminée aurait pu contenir, non seulement et uniquement des ions nitrate NO3-, mais principalement des ions nitrite NO2-, et les ions nitrite NO2-, ingérés en abondance, auraient alors pu être à l’origine de l’importante méthémoglobinémie constatée.

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Travaux de la TLGS [«Tehran Lipid and Glucose Study»]

Bahadoran, Z., Mirmiran, P., Jeddi, S., Momenan, A.A., Azizi, F. and Ghasemi, A. (2018) The nitrate-nitrite-nitric oxide pathway: Findings from 20 years of the Tehran Lipid and Glucose Study. International Journal of Endocrinology and Metabolism 16(4(Suppl)):e84775

(voir l'abstract et le texte entier ici)

Dans un article de synthèse, les auteurs iraniens [Université Shahid Beheshti, Téhéran, Iran] récapitulent diverses données

- ayant trait à la voie métabolique Nitrate alimentaire – Nitrite – Oxyde nitrique NO, en physiologie comme en pathologie.

- et enregistrées, lors de la dernière décennie, par la «Tehran Lipid and Glucose Study [TLGS]».

Selon ces travaux,

• chez la femme,

des teneurs sériques élevées en NOx [nitrate NO3- + nitrite NO2-] sont statistiquement liées:

- au syndrome métabolique,

- au phénotype de l’hypertriglycéridémie,

- à la néphropathie chronique

[Elevated serum NOx was related to increased incidence of metabolic syndrome (odds ratio (OR) = 1.75 […]), hypertriglyceridemic-waist phenotype (OR = 1.39 […]), chronic kidney disease (OR = 1.86 […]) in women].

• chez l’homme comme chez la femme,

- des teneurs sériques élevées en NOx, sont statistiquement liées:

- à la pathologie cardiovasculaire (hazard ratio (HR) = 1.35)

[(Elevated serum NOx was related to increased incidence of) cardiovascular disease (hazard ratio (HR) = 1.35) in the total population].

- des apports alimentaires importants en nitrite NO2- sont liés:

- à une diminution du risque d’apparition de l’hypertension artérielle,

- à une diminution du risque d’apparition de la néphropathie chronique,

- tandis que des apports alimentaires en nitrite NO2- supérieurs à 8.77 mg NO2- j-1 joints à de faibles apports en vitamine C sont liés à une augmentation du risque d’apparition du diabète sucré de type 2.

[In participants with low vitamin C intake, higher intakes of NO2 (≥ 8.77 mg/d) were accompanied with increased risk of diabetes (HR = 2.43 […]). A decreased risk of hypertension (OR = 0.58 […]) and chronic kidney disease (OR = 0.50 […] was observed in response to higher intakes of NO2]

Ces données sont présentées dans les deux tableaux ci-dessous:

AUTEUR

PATHOLOGIE

N sujets

SUIVI (années)

POPULATION

 NOx μmol l-1

OR* ou HR*

Ghasemi (2012)

Σ métabolique

1137

3.3

♀ adultes

≤ 35.0

1.00

 

 

 

 

 

> 35.0

1.75

Bahadoran

(2016)

Néphropathie chronique

1063

3

♂adultes

< 21.0

1.00

 

 

 

 

 

21 à 32

1.44

 

 

1441

 

♀ adultes

< 21.0

1.00

 

 

 

 

 

21 à 32

1.53

 

 

 

 

 

> 32

1.86

Hadaegh 2016)

Cardiopathies

2443

3.3

♂ et ♀ adultes

 

1.35

Bahadoran (2015)

Hypertriglycéridémie

762

6<

♂adultes

< 20.9

1.00

 

 

 

 

 

20.9 à 29.9

1.41

 

 

1172

 

♀ adultes

< 19.9

1.00

 

 

 

 

 

19.9 à 30.9

1.19

 

 

 

 

 

> 30.9

1.39

 

AUTEUR

PATHOLOGIE

N sujets

SUIVI (années)

POPULATION

APPORTS

HR* ou OR*

Bahadoran (2017)

Diabète type 2

2139

5.8

♂ et ♀ adultes

> 410 mg NO3- j-1

1.38

 

 

 

 

 

> 8.77 mg NO2- j-1 + peu de vit C

2.43

 

 

 

 

 

> 8.77 mg NO2- j-1 + beaucoup de vit C

0.91

Bahadoran (2016)

Néphropathie chronique

1780

5.8

♂ et ♀ adultes

< 7.6 mg NO2- j-1

1.00

 

 

 

 

 

7.6 à 10.7 mg NO2- j-1

0.76

 

 

 

 

 

> 10.7 mg NO2- j-1

0.50

Bahadoran (2016)

Hypertension artérielle

1878

5.8

♂ et ♀ adultes

< 7.5 mg NO2- j-1

1.00

 

 

 

 

 

7.5 à 10.6 mg NO2- j-1

0.66

 

 

 

 

 

> 10.6 mg NO2- j-1

0.58

*[OR: odds ratio. HR: hazard ratio]

Commentaire du blog

Un tel article de synthèse témoigne de l’important investissement de l’équipe iranienne sur le thème scientifique auquel le blog «Nitrates et santé – Le blog des nitrates» est consacré.

Les résultats obtenus ne seront pas pris en considération isolément, mais confrontés à tous ceux que d’autres équipes ont pu publier par ailleurs. Cf. les pages RUBRIQUES PAR THEMES et RUBRIQUES PAR THEMES 2 du blog.

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Eaux d’adduction publique aux Etats-Unis

Schaider, L.A., Swetschinski, L., Campbell, C. and Rudel, R.A. (2019) Environmental justice and drinking water quality: are there socioeconomic disparities in nitrate levels in U.S. drinking water? Environmental Health doi: 10.1186/s12940-018-0442-6.

(voir l'abstract et le texte entier ici)

«Silent Spring» («Printemps silencieux»), tel est le titre d’un ouvrage célèbre (1962), écrit par la biologiste américaine Rachel Carson (1907-1964). Rachel Carson signalait à l’époque que l’emploi en tant qu’insecticide du dichlorodiphényltrichloroéthane, ou DDT, contribuait à diminuer l’épaisseur ou la solidité de la coquille de certains oiseaux, et augmentait leur mortalité. Dix ans plus tard, en 1972, l’emploi du DDT fut interdit aux Etats-Unis, ainsi que dans un certain nombre d’autres pays.

On nota, par la suite, une reprise fâcheuse de l’épidémie de paludisme, qui toucha des millions de personnes. En 2006, l’Organisation Mondiale de la Santé recommanda de nouveau l’usage de l’insecticide. Grâce à cette mesure, l’Afrique du Sud a, par exemple, l’espoir de voir la maladie éradiquée dès 2018.

«Silent Spring» a marqué les esprits. Sensibles aux courants écologistes, certaines personnes s’en inspirent. Aux Etats-Unis, dans l’Etat du Massachussetts, existe ainsi un «Silent Spring Institute». Les auteurs de l'article, publié dans le journal «Environmental Health», en sont membres.

Leur travail a consisté à enregistrer les teneurs en nitrate NO3- dans l’eau distribuée par 39466 réseaux de distribution publique aux Etats-Unis entre 2010 et 2014. Les réseaux approvisionnent en eau potable 233 millions de personnes, soit plus de 70 % de la population américaine.

- La grande majorité des eaux d’adduction publique distribuée aux Etats-Unis ont une teneur en nitrate inférieure à 4.43 mg NO3- l-1.

- 4 % d’entre elles, approvisionnant 5.6 millions de personnes ont une teneur en nitrate égale ou supérieure à 22.15 mg NO3- l-1.

- Très peu, moins de 1 %, ont des teneurs en nitrate NO3- supérieures à la concentration maximale en nitrate retenue par l’administration des Etats-Unis: 44.3 mg NO3- l-1

[While > 99 % of the community water systems do not exceed the nitrate maximum contaminant level [MCL] of 10 mg NO3--N l-1[…]].

A la recherche de disparités socio-économiques, les auteurs se penchent sur les origines ethniques des populations, leur richesse ou leur pauvreté. Ils constatent que:

- les populations d’origine hispanique ont tendance à être tributaires d’une eau d’adduction publique dont la concentration en nitrate NO3- est supérieure à la moyenne [High nitrate community water systems served nearly twice as many Hispanic residents on average compared to low nitrate community water systems],

- les populations noires ont tendance à être tributaires d’une eau d’adduction publique dont la concentration en nitrate NO3- est inférieure à la moyenne [By contrast, high nitrate community water systems served less than half as many Black residents on average compared to low nitrate community water systems].

- les personnes pauvres ont tendance à être un peu moins nombreuses, bien que la différence reste significative, dans les secteurs où l’eau d’adduction publique est riche en nitrate NO3- [Rates of poverty and home ownership were marginally, albeit significantly, lower in counties served by systems with higher nitrate concentrations].

Commentaire du blog

Dans l’ensemble, aux Etats-Unis, les concentrations en nitrate NO3- des eaux d’adduction publique sont faibles, ou très faibles. Il convient, cependant, de rappeler que, quelles qu’elles soient ou quelle que soit leur importance, les teneurs en nitrate NO3- des eaux d’adduction publique ne font jamais courir aucun risque à la santé humaine. Le risque est, en effet, nul chez l’adulte comme chez l’enfant, le nourrisson et le nouveau-né.

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Patches de trinitrate de glycérol chez le prématuré et méthémoglobinémie

Mintoft, A., Williams, E., Harris, C., Kennea, N. and Greenough, A. (2018) Methemoglobinemia during the use of glyceryl trinitrate patches in neonates: two case reports. American Journal of Perinatology Reports 2018;8:e227-e229

(voir l'abstract et le texte entier ici)

L’oxydation de l’hémoglobine la transforme en méthémoglobine, l’atome de fer passant de l’état ferreux (Fe2+) à l’état ferrique (Fe3+). Chez le nourrisson âgé de moins de six mois, l’ingestion de nitrite NO2-, comme l’inhalation d’oxyde nitrique NO, sont en mesure, on le sait, de provoquer ce type de transformation [Methemoglobinemia is formed as a result of the oxidization of iron from its ferrous (Fe2+) to ferric (Fe3+) state and can occur following exposure not only to inhaled nitric oxide (iNO) but also nitrite containing medications].

Les patches de trinitrate de glycérol (trinitroglycérine, nitroglycérine ou trinitrine) sont parfois utilisés, chez l’adulte et chez le nouveau-né, pour traiter des phénomènes ischémiques affectant les doigts ou les membres [Glyceryl trinitrate (GTN) patches are used in the treatment of ischemic digits and limbs in neonates and in adults].

Les auteurs britanniques [Londres, Royaume-Uni] relatent deux cas de méthémoglobinémie ayant concerné des nouveau-nés après utilisation de patches de trinitrate de glycérol.

1) Le premier nouveau-né naît après 24 semaines de gestation. Il ne pèse que 650 grammes. Ses membres inférieurs sont violacés [dusky]. Deux patches de trinitrate de glycérol sont posés, un sur chaque membre inférieur, un troisième ensuite, 24 heures plus tard, sur la main. Le contrôle capillaire détecte une augmentation du taux de méthémoglobine, qui passe en six heures de 1.1 % à 8.4 %. L’arrêt des patches se traduit par une rapide diminution du taux de méthémoglobine. Il chute à moins de 1% en l’espace de deux heures.

2) Le second nouveau-né naît également après 24 semaines de gestation. Il ne pèse que 617 grammes. Le troisième jour, sa tension artérielle est filante. Ses pieds et ses orteils sont froids et pâles. Dix patches de trinitrate de glycérol sont posés aux pieds en cinq jours. Le taux de méthémoglobine culmine à 23.3 %. Vingt-quatre heures après l’arrêt des patches, le taux de méthémoglobine redevient quasi normal: 2.5 %.

Les auteurs britanniques rappellent qu’ester d’acide nitrique ou «nitrate organique», le trinitrate de glycérol est un donneur d’oxyde nitrique NO. Activant la guanylate cyclase, le NO accroît les taux de guanosine-monophosphate cyclique [cGMP]. En résulte une relaxation des muscles lisses vasculaires avec vasodilatation.

Ils font remarquer que l’utilisation des patches de trinitrate de glycérol chez le nouveau-né, n’est pas officiellement admise. Chez le nouveau-né prématuré, la pharmacocinétique du trinitrate de glycérol en administration transdermique reste encore insuffisamment précisée [Glyceryl trinitrate patches remain unlicensed for use in neonates and little is known about the pharmacokinetics of glyceryl trinitrate when used in patch formation in prematurely born neonates].

En conclusion, à l’avenir, au cas où un traitement par patches de trinitrate de glycérol serait appliqué à un grand prématuré, le taux de méthémoglobine devrait impérativement être surveillé [In conclusion, routine monitoring of methemoglobin levels should be undertaken when glyceryl trinitrate patches are used in very prematurely born infants].

Commentaire du blog

La méthémoglobinémie décrite ici, par les auteurs britanniques, chez deux nouveau-nés prématurés est consécutive à l’utilisation d’un «nitrate organique», c’est-à-dire d’un ester d’acide nitrique de structure R-O-NO2 donneur de NO, et non de celle du «nitrate inorganique» qu’est l’ion nitrate NO3-.

Rappelons que sous forme alimentaire l’ion nitrate NO3- n’est pas en mesure, quelle que soit la dose ingérée, de transformer dans l’organisme humain, même modérément, l’hémoglobine en méthémoglobine, que l’ingestion concerne un adulte, un enfant ou un nouveau-né. Il en va différemment de l’ion nitrite NO2-. Si celui-ci est présent dans le biberon d’un nourrisson de moins de six mois, il peut, par contre, éventuellement déclencher une méthémoglobinémie.

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Consommation de nitrate et grossesse

Bahadoran, Z., Mirmiran, P., Azizi, F. and Ghasemi, A. (2018) Nitrate-rich dietary supplement during pregnancy: the pros and cons. Pregnancy Hypertension 11, 44-46

(voir l'abstract ici)

A l’occasion d’une brève revue de synthèse de trois pages, les auteurs iraniens [Shahid Beheshti University of Medical Sciences. Téhéran, Iran] recensent les possibles effets favorables et défavorables de la supplémentation en nitrate NO3-, sous forme par exemple de jus de betterave, chez la femme enceinte.

• Effets favorables

Chez la femme enceinte ayant une biodisponibilité en oxyde nitrique NO affaiblie, une supplémentation en jus de betterave, riche en nitrate, serait en mesure d’atténuer le risque d’hypertension artérielle et de pré-éclampsie. Elle pourrait aussi accroître le flux sanguin placentaire, avec des conséquences favorables sur les santés maternelle et néonatale [Dietary NO3- rich supplement in the NO-deficient pregnant women is now suggested as a more appealing choice with fewer off-target effects which can attenuate hypertension and preeclampsia, improve placenta blood flow and subsequently enhance maternal and neonatal health].

• Effets défavorables

1) Passage des nitrates NO3- dans la circulation et les tissus fœtaux du fait d’un transfert actif transplacentaire.

[Fetal plasma/tissue levels of NO3 or its reduced form, nitrite (NO2), may exceed that of the mother due to transplacental transfer of NO3 through an active transport system; neonate may be therefore in the risk of preloaded with NO3 [Hartman, P.E. (1982)]].

2) Comme le suggèrent des modèles animaux, possibilité de méthémoglobinémie fœtale, d’altération des cellules embryonnaires, même de transformations malignes.

[In the pregnant models, oral administration of NO3 and its transplacental passage has led to methemoglobinemia, alteration in embryonic cells and malignant transformation [Hartman, P.E. (1982); Gruener, N. et al. (1973)]].

3) L’ion nitrate étant connu pour être un inhibiteur du symporteur Na+/I- (NIS), possibilité d’un hypothyroïdisme fœtal.

[Inorganic NO3, a sodium/iodide symporter (NIS) inhibitor, could also disrupt iodide uptake and bioavailability, which leads to a substantial decreased thyroidal iodide stores and thyroid hormone production].

Les auteurs font remarquer que 240 ml d’un jus de betterave peut à lui seul apporter de 300 à 700 mg de nitrate, correspondant à trois fois la Dose Journalière Admissible [DJA] édictée par l’OMS. Au vu des possibles effets défavorables des nitrates alimentaires lors de la grossesse, les auteurs suggèrent que soit mise en œuvre une règlementation plus stricte à l’égard des produits alimentaires à base de betterave [Concerning to a wide range of NO3 content, standardization of beetroot by products for NO3 […] should be considered. The current food labeling legislations may also require to be revised for insertion of NO3 content of beetroot products, an option that can be helpful especially for vulnerable individuals such as pregnant women].

Commentaire du blog

Aucun des effets défavorables décrits chez la femme enceinte n’est réel.

1) La notion de transfert actif transplacentaire des nitrates, évoquée ici par les auteurs, est extraite d’un fragment d’article [P.E. Hartman (1982)], improprement interprété. Les propos de P.E. Hartman étaient autres: «Essentially nothing is known about transplacental transfer of NO3. Again based on iodide accumulation, there is reason to suspect that a specific active transport system may intervene and that fetal NO3 plasma (and tissue) levels may exceed those of the mother. In other words, the neonate could be “preloaded with NO3

2) La méthémoglobinémie fœtale, ou néonatale, qui serait provoquée par les ions nitrate NO3- alimentaires ingérés par la mère pendant la grossesse n’est pas scientifiquement envisageable.

Dans un bref paragraphe, d’ailleurs assez peu étayé, l’article de P.E. Hartman (1982) sur lequel s’appuient les auteurs ne parlait ni de l’être humain ni de l’ion nitrate NO3-: “Even NO2 persists long enough in the maternal blood so that, at least in the rat and guinea pig, methemoglobinemia can be produced in the fetus following transplacental passage; oral administration of NO2 to pregnant hamsters has led to alterations in embryonic cells, including malignant transformation”.

La physiologie est tout à fait rassurante:

a) Chez la mère, les ions nitrate NO3- ne sont transformés en nitrite NO2- que lors du deuxième passage dans la bouche, sous l’effet des nitrate-réductases des germes salivaires. Les nitrates salivaires proviennent alors des nitrates plasmatiques. Ceux-ci proviennent à la fois des nitrates alimentaires (légumes, viandes et eau de boisson) et des nitrates synthétisés en permanence dans l’organisme sous l’action enzymatique des NO synthases. L’ion nitrite NO2- a, par ailleurs, une courte demi-vie, de seulement quelques minutes.

b) Chez le fœtus et le nouveau-né, l’ion nitrate NO3- ne peut absolument pas être transformé en ion nitrite NO2-. La cavité buccale est stérile.

3) Sauf erreur, jamais un seul cas clinique d’hypothyroïdie du nouveau-né n’a été décrit qui ait un lien quelconque avec une consommation maternelle de nitrate NO3-.

Ainsi, contrairement à ce qu’écrivent les auteurs iraniens dans leur conclusion, la consommation de nitrate NO3- pendant la grossesse n’est absolument pas toxique pour l’embryon, le fœtus ou le nouveau-né. Sans restriction, les femmes enceintes peuvent continuer à consommer des légumes, notamment des légumes particulièrement riches en nitrate NO3- tels la salade, les épinards ou la betterave. Elles le font d’ailleurs depuis toujours, et à juste titre, sans crainte ni appréhension.

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