Santé cardiovasculaire. Le mieux: nitrate ou nitrite?

Kapil, V., Webb, A.J. and Ahluwalia, A. (2010) Inorganic nitrate and the cardiovascular system. Heart 96, 1703-1709

(voir l'abstract ici)

L’équipe britannique du William Harvey Institute de Londres a récemment présenté les résultats de travaux consacrés à l’effet d’une supplémentation orale en nitrate de potassium sur les teneurs plasmatiques en nitrate, sur les teneurs plasmatiques en nitrite et sur les chiffres de tension artérielle, systolique et diastolique. Les rubriques du 28 septembre, du 1er et du 5 octobre 2010 en ont rendu compte.

Dans cette nouvelle publication, les trois auteurs britanniques, de la même équipe du William Harvey Institute, font le point sur les effets cardiovasculaires des ions nitrate et nitrite.

Dans leur introduction, ils rappellent qu’au cours des dernières décennies, dans les milieux scientifiques, l’accord s’est fait sur l’effet favorable exercé sur le système cardiovasculaire par les régimes alimentaires riches en légumes et en fruits. Ceux-ci diminuent la tension artérielle, en même temps qu’ils réduisent les risques d’apparition des affections vasculaires cérébrales et cardio-ischémiques. Le mécanisme exact reste incertain. On a d’abord cru qu’on devait cet effet aux vitamines anti-oxydantes d’origine alimentaire. Deux méta-analyses récentes n’ont pas confirmé l’hypothèse. Certains scientifiques, comme Lundberg (2006), en sont venus à évoquer le rôle possible des nitrates, que des légumes comme la laitue ou la betterave contiennent en grande quantité.

Les auteurs signalent le rôle pivot exercé par l’oxyde nitrique NO dans l’homéostasie vasculaire.

Ils décrivent de façon claire et détaillée le métabolisme des nitrates.

Ils rapportent les différents travaux consacrés aux effets des ions nitrate et nitrite sur la tension artérielle, l’hypercholestérolémie, les lésions d’ischémie/reperfusion, la consommation d’oxygène à l’occasion des exercices physiques.

Par son originalité, le dernier chapitre intitulé: «Advantages and disadvantages of NO2-/NO3-» peut retenir l’attention. L’ion nitrate NO3- se comporte comme une pro-drogue («prodrug») à l’égard de l’ion NO2- biologiquement actif («bioactive»). A première vue, on pourrait considérer que, lorsqu’il s’agit d’améliorer les conditions cardiovasculaires, le recours aux ions nitrate ou aux ions nitrite puisse être indifférent. Tel ne semble pas être le cas.

Après leur ingestion, les ions nitrate ont, dans le secteur plasmatique, une demi-vie de 6 heures environ, bien plus longue que celle dont fait preuve l’ion nitrite, que ce dernier soit introduit par voie orale ou intraveineuse: entre 20 et 40 minutes. En outre, après ingestion de nitrate, l’élévation du taux plasmatique de nitrite est, à la fois, lente et soutenue; le taux plasmatique de nitrite reste légèrement élevé 24 heures après un apport unique en nitrate. Dans cette perspective, les apports en nitrate apparaissent préférables aux apports en nitrite.

Le régime mis en place lors de la «Dietary Approaches to Stop Hypertension (DASH) study», maintenant connu pour réduire avec efficacité la tension artérielle, apporte 20 mmol, soit 1240 mg, de NO3- par jour. Toujours administrativement en vigueur, la Dose Journalière Admissible (DJA) pour le NO3- est de 3.7 mg/kg/jour, une dose qui correspond à un apport de 259 mg par jour de NO3- pour un adulte de 70 kg. La dose bénéfique et efficace à l’égard des affections cardiovasculaires s’avère donc près de cinq fois plus élevée que celle que les réglementations en vigueur prescrivent d’éviter de dépasser.

Les auteurs se penchent sur les raisons parfois invoquées pour légitimer le maintien de la DJA pour les nitrates. Ni le risque de méthémoglobinémie chez l’adulte, ni le risque carcinogène ne peuvent être raisonnablement retenus.

Leur conclusion est encourageante. Après qu’on aura procédé à un réexamen des recommandations réglementaires concernant la DJA et la teneur maximale dans l’eau du robinet, il sera possible, disent-ils, de promouvoir une politique de santé à la fois peu coûteuse et extrêmement large dans son application; une telle politique de santé consistera à augmenter les apports alimentaires en nitrates, par l’intermédiaire d’une consommation accrue en légumes et en fruits [Hence a cheap and widely applicable public health initiative in increasing fruit and vegetable-rich diets could, by increasing the dietary intake of NO3-, potentially improve outcomes in cardiovascular health and should provide food for thought with respect to reexamining the guidelines for the recommended intake of NO3- and tight regulation of NO3- in our tap water.]

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