Nitrates des légumes et méthémoglobinémie

Chan, T.Y.K. (2011) Vegetable-borne nitrate and nitrite and the risk of methaemoglobinaemia. Toxicology Letters 200, 107-108.

(voir l'abstract ici)

Publié dans «Toxicology Letters», écrit par un pharmacologue de Hong Kong., ce commentaire porte sur les liens entre les ions nitrate et nitrite et le risque de méthémoglobinémie.

L’auteur rappelle que les légumes contiennent souvent de fortes teneurs en ions nitrate et que la méthémoglobinémie fait suite à la conversion d’ions nitrate en ions nitrite. Le risque de méthémoglobinémie prédomine chez le nourrisson de moins de 3 mois; l’affection peut aussi être observée à un âge plus avancé [Infants under 3 months old are particularly susceptible to methaemoglobinaemia. Older infants and chidren are also at risk].

Dans les légumes frais et intacts, les teneurs en nitrite sont habituellement très basses. Par contre, si les conditions de conservation sont défectueuses, les concentrations en nitrite des légumes augmentent, par suite d’une contamination bactérienne [In fresh, undamaged vegetables, the nitrite concentrations are usually very low. Under adverse post-harvest storage conditions, nitrite concentrations in vegetables increase as a result of bacterial contamination […]].

L’auteur continue en mentionnant que la réduction des ions nitrate en ions nitrite dans la cavité buccale est la plus importante source d’ions nitrite; elle rend compte de 70 à 80 % de l’exposition humaine totale en nitrite [Oral reduction of nitrate is the most important source of nitrite, accounting for approximately 70-80 % of the human total nitrite exposure].

Selon lui, pour «maximaliser» les effets bénéfiques dus à la consommation des légumes, il conviendrait de prendre des mesures, de manière à réduire les expositions en ions nitrate et en ions nitrite tout en maintenant les apports recommandés globaux en légumes [In order to maximise the health benefits from eating vegetables (WHO, 2003), measures should be taken to reduce the nitrate and nitrite exposures while maintaining the recommended intake of vegetables].

Sa conclusion comporte deux propositions apparemment discordantes: 1) La consommation de légumes à haute teneur en nitrates ne fait pas courir de risque de méthémoglobinémie, quand ceux-ci sont correctement conservés et préparés. 2) Toutefois, il convient d’éviter la consommation de légumes à la maison chez le nourrisson de 3 mois, voire plus [It is safe to eat vegetables with higher nitrate content, if they have been properly stored and prepared. However, home prepared infant food containing vegetables should be avoided until the infant is 3 months or older].

Commentaire du blog

Lors de la préparation des purées de légumes à destination des nourrissons, il est impératif, comme on le sait, de bien respecter les règles d’hygiène; celles-ci consistent à ne pas laisser les purées de légumes plus de 24 heures au réfrigérateur, plus de 6 heures à température ambiante. C’est sans doute parce qu’il redoute que les règles classiques ne soient pas toujours parfaitement respectées que l’auteur préfère terminer par une recommandation générale de prudence et d’éviction.

Plusieurs erreurs méritent d’être signalées:

1) L’auteur ne semble pas avoir connaissance des travaux montrant que la transformation des nitrates en nitrites, consécutive à une pullulation bactérienne dans le biberon et responsable de la méthémoglobinémie du nourrisson, est soumise à un phénomène de seuil, autour de 106 germes ml-1 [rubrique des 7, 11 et 14 mai 2010].

2) Il évoque des transformations nitrate-nitrite dans l’organisme, qui, pour les raisons qui suivent, ne peuvent réellement apparaître fondées:

2a) Evoquant la réduction bactérienne des nitrates salivaires en nitrites salivaires dans la cavité buccale, il omet, en fait, de signaler qu’une telle réduction des nitrates salivaires en nitrites salivaires n’existe pas chez le nourrisson de moins de six mois. La réduction n’existe pas à l’âge de la vie où, justement, le risque de méthémoglobinémie existe.

2b) Au cours de l’article, on remarquera qu’il avance une autre possibilité de transformation endogène des nitrates en nitrites chez le nourrisson de moins de trois mois: sa faible acidité gastrique; d’où une prolifération de bactéries dans l’intestin, et une réduction des nitrates ingérés en nitrites [Their lower gastric pH results in proliferation of intestinal flora, which reduce the ingested nitrate to nitrite]. L’affirmation est doublement erronée. Le pH gastrique du nourrisson est identique à celui de l’adulte [Luhby et coll., 1954; Avery et coll., 1966; Jean-Louis et coll., 1993 Reed, 1996]. Absorbés dans l’estomac et la partie haute de l’intestin grêle, les nitrates ingérés ne parviennent pas au gros intestin [Bartholomew et Hill, 1984].    

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