Une synthèse venant du Royaume-Uni

Gilchrist, M., Winyard, P.G. and Benjamin, N. (2009) Dietary nitrate – Good or bad? Nitric Oxide 22, 104-109

(voir l'abstract ici)

Provenant du Royaume-Uni, cette synthèse est rédigée par des scientifiques de l’Université d’Exeter (Devonshire).

Après un rappel de la physiologie des nitrates, les auteurs abordent le chapitre toxicologique. Comme Avery, ils pensent qu’en l’absence de contamination bactériologique les nitrates NO3- ne sont pas capables, par eux-mêmes, de déclencher, chez le nourrisson, un processus méthémoglobinémique. La limite de 45 ou 50 mg par litre ne leur paraît pas nécessaire. Les gouvernements occidentaux dépensent, malgré tout, disent-ils, des millions, voire des milliards de dollars, pour faire baisser les taux de nitrates dans les eaux de consommation.

[Avery argues convincingly that nitrate per se is not the primary cause, and that without bacterial contamination it is unlikely that nitrates will cause infant methemoglobinemia and that 45 or 50 mg/l limit on drinking water nitrate is not necessary. Despite this, Western governments spend many millions, if not billions of dollars in treating water supplies to lower nitrate levels.]

Les études épidémiologiques ont échoué dans leur tentative de démontrer un lien entre les apports alimentaires en nitrates et l’apparition de cancers. Les experts de l’OMS et de la FAO l’ont encore reconnu dans leur rapport de 2003.

Les auteurs britanniques estiment cependant que l’on ne peut pas exclure que les nitrates puissent être cancérigènes dans des sous-groupes de population. Winter et coll. ont, par exemple, montré, en 2007, qu’en cas de reflux gastro-oesophagien, des quantités accrues d’une nitrosamine comme la N-nitrosomorpholine apparaissent à l’intérieur de l’œsophage. Les nitrosamines ont la réputation d’être cancérigènes chez l’animal. On peut ainsi imaginer que le reflux gastro-oesophagien puisse favoriser l’apparition d’un cancer à l’extrémité inférieure de l’œsophage, par l’intermédiaire de ces nitrosamines, elles-mêmes formées à partir des nitrites et des amines.

Les auteurs britanniques décrivent ensuite les nombreux effets bénéfiques des nitrates alimentaires : les effets favorables cardiovasculaires (pression artérielle, fonction endothéliale, fonction plaquettaire, protection contre les lésions d’ischémie-reperfusion, amélioration des performances au cours des exercices physiques), les effets favorables anti-infectieux   (protection contre les caries dentaires, contre les infections gastro-intestinales, contre les infections cutanées), les effets favorables de protection à l’égard de l’apparition d’ulcérations gastro-intestinales.

Leur conclusion est « balancée ». Les années qui s’annoncent devraient nous dire s’il nous faut augmenter ou diminuer les quantités de nitrates dans nos rations alimentaires. On peut, plus précisément, disent-ils, espérer que nous serons capables d’identifier les individus (ceux qui souffrent, par exemple, d’hypertension et d’athérosclérose) qui devront sans conteste bénéficier d’une augmentation des apports en nitrates et, à l’inverse, les individus (ceux qui souffrent, par exemple, de dysplasie oesophagienne) qui devront éviter de consommer des aliments trop riches en nitrates.

[The next years should bring more clarity so that we can advise whether we should be taking more or less of this substance in our diet. In particular it is hoped that we can identify individuals (such as those with high blood pressure and atherosclerosis) who will definitely benefit from increased nitrate and conversely individuals (such as those with esophageal dysplasia) who should avoid foodstuffs containing a high concentration of nitrate.]

Commentaires du blog

Malgré son aspect « équilibré », cette conclusion n’est pas sans susciter quelque perplexité. On sait, en effet, que les nitrosamines n’agissent pas au site même de leur formation. Elles ont besoin d’une activation métabolique, principalement hépatique (Cf. les travaux de Magee,  1956, sur la dimethylnitrosamine), avec, dans un premier temps, par exemple, une hydroxylation sous l’influence enzymatique du cytochrome P450 (Cf. Archer, 1989), avant de devenir « actives » et d’être en mesure de réagir avec le DNA des tissus cibles. C’est la raison pour laquelle les nitrosamines n’exercent ni de façon exclusive ni de façon prédominante leurs effets au site de leur formation ; si, par l’intermédiaire de leurs métabolites, elles finissent par exercer un effet sur le DNA de certaines cellules cibles, elles les exercent à distance du site de formation, en fonction d’une spécificité d’organe, propre à chacune d’entre elles et liée à leur propre structure chimique.

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