Teneurs en nitrates des légumes en Espagne

Pardo-Marin, O., Yusà-Pelechià, V., Villalba-Martin, P. and Perez-Dasi, J.A. (2010) Monitoring programme on nitrates in vegetables and vegetable-based baby foods marketed in the region of Valencia, Spain: levels and estimated daily intake. Food Additives and Contaminants 27, 478-486.

(voir l'abstract ici)

Les auteurs espagnols mesurent les teneurs en nitrates NO3- de 1083 légumes et de 67 petits pots pour bébés commercialisés dans la région de Valence entre 2000 et 2008.

Quelle que soit la saison, les teneurs en nitrates de la laitue (Lactuca sativa) sont trouvées plus importantes en serre qu’en plein air; les différences observées entre les unes et les autres sont d’environ 20% en automne et en hiver, de 5% au printemps et en été.

On remarque surtout que, dans l’ensemble, les teneurs sont nettement plus importantes en automne et en hiver qu’au printemps et en été. En moyenne et respectivement, elles sont de 1337 mg NO3- kg-1 en automne et en hiver, de 817 mg NO3- kg-1 au printemps et en été. Lors de l’automne et de l’hiver, l’ensoleillement est moindre qu’au printemps et en été ; de ce fait, les teneurs en nitrates de la laitue sont ainsi majorées de plus de 60%.

Des résultats analogues concernent les épinards (Spinacia oleracea). Leurs teneurs moyennes en nitrates, en automne et en hiver, au printemps et en été, sont respectivement de 1755 et 1269 mg NO3- kg-1. La différence est de 38%.

Certains légumes comme les artichauts, les pommes de terre ou les carottes sont pauvres en nitrates: respectivement et en moyenne: 96, 196 et 203 mg NO3- kg-1.

Inversement, d’autres comme la bette (Beta vulgaris var. cicla), la mâche (Vallerianella locusta) ou la roquette (Eruca sativa) en sont très riches: respectivement et en moyenne: 1597, 2572 et 4474 mg NO3- kg-1.

Dans les petits pots pour bébés à base de légumes analysés, la teneur moyenne en nitrates est de 60 mg NO3- kg-1.

Les auteurs évaluent les apports quotidiens en nitrates provenant des légumes et les comparent à la Dose Journalière Admissible (DJA) [An acceptable daily intake (ADI) of 0-3.7 mg kg-1, equivalent to 222 mg nitrate day-1 for a 60 kg adult, was established by the former Scientific Committee for Food (European Union Scientific Committee for Food (SCF) 1995) and was reconfirmed by the Joint FAO/WHO Expert Committee on Food Additives (JECFA) in 2002].

Selon les estimations des auteurs, les apports quotidiens en nitrates provenant des légumes correspondent respectivement chez un adulte à l’alimentation standard, chez l’adulte végétarien et chez l’enfant à 29 %, 80 % et 15 % de la Dose Journalière Admissible (DJA).

Leur conclusion ne laisse pas transparaître d’inquiétude particulière [Taking into account the vegetable species considered, the data obtained in this study do not show evidence of risk for average consumers […]. In the case of vegetable-based baby foods, the level found were, in all cases, lower than the maximum level proposed by European legislation].

Commentaire du blog

La comparaison des apports quotidiens en nitrates provenant des légumes avec la Dose Journalière Admissible peut surprendre. Comme notre rubrique du 27 novembre 2009 le signalait, l’OMS a pris ses distances depuis 2007 avec la Dose Journalière Admissible pour les nitrates [For chronic exposure, JECFA has proposed an ADI for nitrate of 0-3.7 mg/kg of body weight […]. The value for nitrate is based on a NOAEL of 370 mg/kg of body weight per day in laboratory animal studies; in view of the known interspecies variation in nitrate/nitrite metabolism, however, it was not considered appropriate at this time to use this in the risk assessment for humans].

Les auteurs espagnols omettent de préciser si les petits pots pour bébés qu’ils ont analysés contenaient ou non des betteraves. Signalons que, dans une étude effectuée dans l’Etat de l’Iowa (USA), des petits pots pour bébés contenant des betteraves avaient une teneur moyenne en nitrates, non de 60 mg NO3- kg-1, comme dans celle-ci, mais de 2200 mg NO3- kg-1 (Dusdieker et coll., 2004).

Le mécanisme de la méthémoglobinémie du nourrisson décrit par les auteurs espagnols semble manquer de réelle base scientifique [Young babies with low stomach acidity may suffer from infantile methemoglobinaemia due to excessive nitrates in their diet, where nitrite is substituted for oxygen in haemoglobin and death may occur]. Contenant du liquide amniotique, l’estomac du nouveau-né a, certes, au tout début de la vie ex utero, un pH relativement élevé, entre 4.0 et 7.3. Le fait est cependant éphémère. Quelques heures plus tard, le pH intragastrique du nouveau-né baisse, devenant identique à celui de l’adulte.

Même si les teneurs en nitrates des épinards espagnols sont inférieures aux teneurs maximales édictées par la Commission des Communautés européennes, la préparation de biberons ou de «soupes» avec ces épinards du commerce ne met nullement le nourrisson à l’abri du risque méthémoglobinémique nitrito-induit. Pour éviter que, dans le biberon, les nitrates ne soient transformés en nitrites, il convient de prévenir toute pullulation bactérienne. Le nombre des microbes doit absolument rester inférieur à 106 ou 107 par ml (Cf. nos rubriques du 22 décembre 2009, des 29 janvier, 19 février, 23 février, 26 mars et 24 avril 2010).

Regrettons que les auteurs espagnols aient, par ailleurs, omis de signaler les effets bénéfiques des nitrates.  

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