Supplémentation en nitrate et NO de l’air expiré

Kroll, J.L., Werchan, C.A., Rosenfield, D. and Ritz, T. (2018) Acute ingestion of beetroot juice increases exhaled nitric oxide in healthy individuals. Plos One https://doi.org/10.1371/journal.pone.0191030

(voir le texte entier ici)

Selon les recommandations émises conjointement en 2005 par la Société Thoracique Américaine et la Société Respiratoire Européenne [American Thoracic Society/European Respiratory Society (ATS/ERP)], avant toute mesure de la teneur en oxyde nitrique NO de l’air expiré, il convient d’exiger une restriction alimentaire. Les légumes verts et autres aliments riches en nitrate NO3- sont, en effet, connus pour augmenter la teneur de l’air expiré en NO, sans que les informations sur le sujet soient très précises [FENO50 measurement guidelines recommend avoidance of nitrate-rich foods before assessments as leafy greens and other nitrate-rich foods have been shown to elevate FENO50, but the exact time course and extent of the acute effects of more defined dosages of beetroot juice on FENO50 are not well studied].

Les auteurs américains [Dallas, Texas, USA] présentent une étude effectuée chez 38 sujets (23 hommes, 15 femmes) en bonne santé et âgés en moyenne de 21 ans.

Ils ingèrent:

- soit 70 ml d’un jus de betterave [Beet It Sport] contenant 400 mg de nitrate NO3-,

- soit 70 ml d’eau (groupe contrôle).

Juste avant l’ingestion puis 45 et 90 minutes plus tard, les auteurs mesurent les données suivantes:

- fraction d’oxyde nitrique dans l’air expiré pour un flux expiratoire de 50 ml s-1 [FENO50],

- logarithme naturel de la FENO50 [InFEN50],

- tensions artérielles systolique et diastolique

- rythme cardiaque

Aucune modification significative des tensions artérielles systolique et diastolique ainsi que du rythme cardiaque n’est réellement enregistrée lors des contrôles des 45ème et 90ème minutes. Par contre, les valeurs moyennes de FENO50 (exprimées en parties par milliards (ppb), ou nanolitres (10-9 l) par litre) et de InFENO50 sont significativement augmentées.

 

 

Apport de 400 mg de nitrate NO3-

Groupe contrôle

FENO50 (ppb)

Avant

19.1

20.7

 

45 minutes plus tard

34.6

20.9

 

90 minutes plus tard

33.7

20.9

InFENO50

Avant

2.95

3.03

 

45 minutes plus tard

3.54

3.04

 

90 minutes plus tard

3.52

3.04

Après l’ingestion de 400 mg de nitrate NO3-, les valeurs moyennes du logarithme naturel de la FENO50 (InFENO50) sont ainsi en augmentation:

- de 21.3% à la quarante-cinquième minute,

- et de 20.3 % à la quatre-vingt dixième minute.

[After beetroot consumption, average values of the natural log of FENO50 (InFENO50) increased by 21.3 % (p < 0.001) 45 minutes after consumption and by 20.3 % (p < 0.001) 90 min after consumption].

Un petit groupe de sujets, au nombre de quatre, complètent l’étude un peu plus longtemps, jusqu’à la troisième heure. Des teneurs élevées de l’air expiré en oxyde nitrique sont encore constatées [A small subset (n = 4) of participants completed an extended protocol lasting over 3 hours, where elevated levels of FENO50 persisted].

Ainsi, dans la mesure où elle accentue la biodisponibilité en oxyde nitrique NO, l’ingestion de jus de betterave riche en nitrate NO3- pourrait renforcer, en regard des voies aériennes supérieures et inférieures, notamment du tractus oropharyngé, la première ligne de défense vis-à-vis des agents infectieux et pathogènes, que l’on connaît sous le nom d’immunité innée. Les auteurs souhaitent qu’à l’avenir des études se penchent sur les possibles effets bénéfiques, au long cours, du jus de betterave et de la supplémentation alimentaire en nitrate NO3- vis-à-vis des infections et maladies respiratoires [Elevated FENO50 indicates that ingestion of beetroot juice leads to an increase in bioavailability of NO, which could be expected to boost innate immune defense in upper and/or lower airways, including the oropharyngeal tract, which forms a major entry for pathogens […]. Our findings (provide) proof of manipulation success for future studies examining the potential beneficial effects of long-term beetroot juice and dietary nitrate supplementation on respiratory infection and illness].

Commentaire du blog

• Chez un jeune garçon de 12 ans atteint de mucoviscidose, un apport de 800 mg de nitrate NO3- a, on le sait, fait passer la FENO de 20 ppb à 50 ppb 90 minutes plus tard [rubrique du 4 novembre 2016].

• L’effet anti-infectieux des nitrates a déjà été évoqué à plusieurs reprises dans le blog “Nitrates et santé – Le blog des nitrates” [Cf. rubriques des 17 mars 2012, 2 et 26 avril 2013, 25 octobre 2016 et 13 mars 2017].

S’il venait à être confirmé par les études à venir, l’effet anti-infectieux dans le tractus oropharyngé et les voies aériennes de la consommation de nitrate NO3-, ici avancé à titre d’hypothèse par les auteurs texans, viendrait s’ajouter à l’effet anti-infectieux, déjà bien connu, du même apport en nitrate dans le tractus gastro-intestinal.

On peut en rappeler brièvement le processus: Les nitrates ingérés sont rapidement absorbés dans l’estomac et la partie haute de l’intestin grêle. Par les glandes salivaires, une partie des nitrates plasmatiques sont transférés de manière active du plasma vers la salive. Les nitrates salivaires sont, en partie, réduits en nitrites par les nitrates-réductases des bactéries de la flore buccale. Après leur déglutition, les nitrites d’origine salivaire sont transformés dans le milieu acide de l’estomac en oxyde nitrique NO, lequel se lie au radical libre superoxyde pour former l’ion peroxynitrite ONOO-, très puissant bactéricide.

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