Nitrates alimentaires et revascularisation

Hendgen-Cotta, U.B., Luedike, P., Totzeck, M., Kropp, M., Schicho, A., Stock, P., Ramnos, C., Niessen, M., Heiss, C., Lundberg, J.O., Weitzberg, E., Kelm, M. and Rassaf, T. (2012) Dietary nitrate supplementation improves revascularization in chronic ischemia. Circulation 126, 1983-1992

(voir l'abstract ici)

On nomme revascularisation le mécanisme de réparation qui permet de restaurer le flux sanguin dans un tissu rendu ischémique et faiblement vascularisé.

On sait que, dans ce processus, l’oxyde nitrique NO joue un rôle important.

Les auteurs allemands [Hôpital Universitaire de Düsseldorf] et suédois [Karolinska Institute de Stockholm] se proposent de vérifier si, chez l’animal, le remodelage post-ischémie du réseau vasculaire est accéléré par des apports alimentaires en ion nitrate NO3- (cet ion qui, comme on le sait, est transformé, après circulation entérosalivaire, en nitrite NO2-, en oxyde nitrique NO et autres oxydes d’azote).

Des souris, âgées en moyenne de 14 semaines, pesant environ 30 grammes, reçoivent pendant 14 jours, ou bien une eau de boisson non nitratée (groupe contrôle), ou bien une eau de boisson contenant 729 mg NO3- l-1, sous forme de nitrate de sodium [NaNO3]. La concentration de cette eau en nitrate est équivalente à celle des légumes riches en nitrate [This is equivalent to a rich vegetable intake in human]. En moyenne, les souris du deuxième groupe ingèrent 9,3 mg de nitrate NO3- par jour.

Au 7ème jour de l’expérience, les animaux sont anesthésiés. Au milieu de la cuisse d’une patte postérieure, l’artère fémorale est doublement ligaturée. Entre les deux ligatures, une portion d’artère fémorale est excisée.

Sept jours plus tard, au 14ème jour de l’expérience, la différence de revascularisation entre les deux groupes de souris est analysée.

Comme prévu, les concentrations plasmatiques en nitrate NO3-, en nitrite NO2- et en S-nitrosothiol sont plus fortes chez les souris du deuxième groupe:

- 28 versus 2 mg NO3- l-1,

- 267 versus 78 μg NO2- l-1,

- 349 versus 9 nM S-nitrosothiol.

Evaluée par laser Doppler et comparée à celle des souris contrôles, l’intensité de la microcirculation est significativement augmentée chez les souris «traitées». Les taux de perfusion sont respectivement de 73% chez les souris «traitées» au nitrate de sodium et de 59% chez les souris «contrôles».

Les auteurs montrent que l’amélioration est associée à une augmentation de la mobilisation de cellules lymphocytaires CD34+/Flk-1+ ainsi qu’à une augmentation de la migration vers les tissus ischémiques de cellules d’origine médullaire, CD31+/CD45- [This improvement was associated with […] an elevated mobiization of CD34+/Flk-1+ cells and migration of bone-marrow-derived CD31+/CD45- cells into ischemic tissue].

Ils procèdent à une contre-expérience. Un sous-groupe de rats reçoit pendant les 14 jours un bain de bouche antibactérien à l’hexétidine. Chez ces souris, l’amélioration de la revascularisation se trouve abolie [The regenerative effects of nitrate treatment were abolished by eradicating nitrate-reducing bacteria in the oral cavity through an antiseptic mouthwash]. La meilleure revascularisation observée chez les souris consommant une eau riche en nitrate de sodium sans recevoir, par ailleurs, de bain de bouche antibactérien est donc à mettre sur le compte des ions nitrate ingérés. Ingérés, les ions nitrate sont absorbés. Ils parviennent dans le plasma. Les glandes salivaires puisent les ions nitrate plasmatiques pour les faire passer à forte concentration dans la salive. Les germes de la flore buccale [108 germes ml-1] transforment ensuite, en partie, les ions nitrate salivaires en ions nitrite. Les ions nitrite sont transformés en oxyde nitrique NO et en oxydes d’azote. L’effet bénéfique peut avoir lieu [The fact that mouthwash prevented increases in plasma nitrite and all observed beneficial effects of nitrate provides significant mechanistic insight since it suggests an important role of intermediate nitrite formation in bioactivation of nitrate].

Un tel effet des nitrates alimentaires vient s’ajouter aux nombreux autres effets bénéfiques cardiovasculaires déjà décrits [voir la page «Rubriques par thèmes»]. Au vu des résultats de cette étude, on peut imaginer qu’à l’avenir, chez l’homme, une stratégie thérapeutique de nature nutritionnelle vienne accélérer la revascularisation des patients atteints de pathologie ischémique [These results suggest that dietary nitrate supplementation may offer an attractive nutrition-based strategy to improve ischemia-induced revascularization].

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