Effet insulinotrope des nitrites et du NO

Nyström, T., Ortsäter, H., Huang, Z., Zhang, F., Larsen, F.J., Weitzberg, E., Lundberg, J.O. and Sjöholm, A. (2012) Inorganic nitrite stimulates pancreatic islet blood flow and insulin secretion. Free Radical Biology and Medicine 53, 1017-1023

(voir l'abstract ici)

Sous l’effet de l’insuline, sans qu’en réalité l’hormone n’agisse directement, il semble bien que ce soit la production d’oxyde nitrique NO par la cellule endothéliale qui permette l’activation de la translocation de la GLUT4 dans la cellule du muscle squelettique ainsi que dans la cellule adipeuse [Cf. rubrique du 24 mars 2014].

En 2012, dans un registre voisin, l’équipe du Karolinska Institute [Stockholm, Suède] a mis en évidence une double action de l’ion nitrite NO2- et de l'oxyde nitrique NO, d’une part sur le flux sanguin insulaire (concernant les îlots de Langerhans), d’autre part sur la sécrétion d’insuline par ces mêmes îlots. Leur étude a été présentée dans la rubrique du 18 octobre 2012. Il nous a paru souhaitable d'en faire un nouvel exposé. Dans le cadre du diabète, de son mécanisme physiopathologique et de son traitement, l'étude suédoise et l'étude américaine apparaissent, en effet, complémentaires.

• A des rats pesant de 350 à 400 grammes, préalablement anesthésiés, les auteurs injectent par voie intrapéritonéale,

- soit du sérum salé isotonique à 0.9 %,

- soit de 38 à 44.5 ng de nitrite NO2- par gramme de poids corporel (sous forme de nitrite de sodium NaNO2).

L’injection intrapéritonéale de nitrite NO2- (sous forme de nitrite de sodium NaNO2) est suivie d’une augmentation de la concentration plasmatique en nitrite. Celle-ci atteint, en moyenne, 14 μg NO2- l-1 [alors qu’au préalable, elle n’est, en moyenne, que de 2.7 μg NO2- l-1 et que, chez les rats qui reçoivent le sérum salé isotonique par voie intrapéritonéale, elle ne dépasse pas, en moyenne, 3.5 μg NO2- l-1].

Cette injection intrapéritonéale de nitrite NO2- (sous forme de nitrite de sodium NaNO2) est suivie d’une augmentation significative du flux sanguin insulaire, le flux sanguin qui assure la vascularisation des îlots de Langerhans:

- Dix minutes après l’injection intrapéritonéale, chez les rats témoins ayant reçu le sérum salé isotonique, le flux sanguin insulaire est évalué, en moyenne, à 80 μl/min/g.

- Dix minutes après l’injection intrapéritonéale de nitrite de sodium, il est évalué, en moyenne, à 120 μl/min/g.

Cette augmentation du flux sanguin insulaire est suivie par une augmentation de la concentration plasmatique d’insuline:

- En moyenne, après l’injection intrapéritonéale de sérum salé isotonique, la concentration plasmatique d’insuline à jeun est évaluée à 3.2 ng ml-1.

- En moyenne, après l’injection intrapéritonéale de nitrite NO2- sous forme de nitrite de sodium Na NO2, elle est évaluée à 4 ng ml-1.

• Pour mieux comprendre le mécanisme de l’effet insulinotrope de l’ion nitrite in vivo, les auteurs procèdent à une étude complémentaire in vitro, sur des îlots de Langerhans isolés et mis en culture [In an effort to pin down the precise nature of the above in vivo insulinotropic effects of nitrite, mechanistic studies were done on isolated islets in vitro].

Quand, après avoir été isolés et cultivés en condition basale (concentration de glucose: 5 mM), les îlots de Langerhans sont incubés en présence de nitrite NO2- à la concentration de 460 μg NO2- l-1 (sous forme de nitrite de sodium Na NO2), la sécrétion d’insuline in vitro se trouve stimulée. Elle passe, en moyenne, de 5 à 7 μg/μg de protéine.

Par contre, in vitro, un tel effet insulinotrope ne s’observe, ni avec l’ion nitrite NO2- en condition de stimulation, lorsque la concentration de glucose est plus élevée (15 mM), ni avec l’ion nitrate NO3-, aux deux concentrations de glucose retenues.

L’action insulinotrope en condition basale de l’ion nitrite est, par ailleurs, totalement inhibée par l’adjonction au milieu de 100 μM de 1H-[1,2,4] oxadiazolol[4,3-a]-quinoxaline-1-one. Connu sous le nom d’ODQ, le produit utilisé est un inhibiteur de la guanylyl cyclase, cet enzyme qui assure la transformation de la guanosine triphosphate [GTP] en guanosine monophosphate cyclique [GMP cyclique]. On peut légitimement penser que l’augmentation par les ions nitrite NO2- de la sécrétion pancréatique d’insuline fait intervenir la guanosine monophosphate cyclique [GMP cyclique], et par conséquent, ce qui correspond à l’étape précédente, qu’elle fait également intervenir la formation d’oxyde nitrique NO [The insulin secretion evoked by sodium nitrite was totally abolished after incubation with the guanylyl cyclase [GC] inhibitor ODQ (100 μM), suggesting that the insulin secretory effect induced by nitrite involves cGMP and thus likely formation of NO].

Au total, chez le rat, comme le font remarquer les auteurs, le rôle stimulateur de l’ion nitrite NO2- sur la sécrétion pancréatique d’insuline semble double, à la fois indirect et direct:

- indirect, par l’intermédiaire d’une accentuation du flux sanguin insulaire,

- direct, par un effet insulinotrope sur la cellule bêta.

Ce double rôle laisse entrevoir un important champ d’investigation pour la recherche. L’ion nitrite NO2- se présente comme un transmetteur endocrine, favorisant la sécrétion d’insuline.

[In conclusion, we report a novel and dual stimulatory role of nitrite on insulin secretion in rats, involving both indirect enhancement (through microcirculation redistribution) and direct insulinotropic effects on the β cell. This dual role of nitrite opens an exciting field, in which nitrite may play an important role as an endocrine transmitter influencing insulin secretion].

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