Etude de la dynamique du métabolisme du NO

Saijo, F., Milsom, A.B., Bryan, N.S., Bauer, S.M., Vowinkel, T., Ivanovic, M., Andry, C., Granger, D.N., Rodriguez, J. and Feelisch, M. (2010) On the dynamics of nitrite, nitrate and other biomarkers of nitric oxide production in inflammatory bowel disease. Nitric Oxide 22, 155-167.

(voir l'abstract ici)

Depuis quelques années l’habitude est prise de considérer les ions nitrate et nitrite comme des marqueurs fidèles de la production d’oxyde nitrique NO.

Le très important travail de Saijo et coll. fera date. Chez le rat, comme ils le démontrent, un processus inflammatoire localisé, en l’occurrence une inflammation colique expérimentale, est capable de déclencher des modifications du métabolisme de l’oxyde nitrique d’une complexité inattendue.

Les auteurs américains, qui oeuvrent à Boston (Massachusetts) et Shreveport (Louisiane), induisent chez des rats des colites, aiguës ou chroniques, en faisant ingérer aux animaux avec leur eau de boisson, selon des rythmes appropriés, du Dextran Sulfate de Sodium (DSS) à 5%. Pour essayer de comprendre la dynamique des modifications du métabolisme du NO ainsi induites, ils dosent de manière répétitive, presque chaque jour pendant 7 jours en cas de colite aiguë (ainsi que les 4 jours suivants) et à la fin des six semaines en cas de colite chronique, les taux de nitrate NO3-, de nitrite NO2-, de composés S- et N-nitrosés tant dans plasma que dans de nombreux tissus (côlon, cerveau, cœur, foie, rein, aorte, veine cave inférieure).

Dans le plasma, en cas de colite aiguë, les taux de nitrate et ceux de nitrite sont relativement bien corrélés avec l’index d’activité de la maladie (disease activity index ou DAI), du moins pendant la phase d’induction. Bizarrement, au quatrième jour suivant l’arrêt des ingestions de DSS, alors que le DAI baisse, ces taux de nitrate et ces taux de nitrite sont l’objet d’une évolution en sens contraire, c’est-à-dire d’une nouvelle ascension. Dans le plasma, en cas de colite chronique, les taux des nitrites augmentent proportionnellement davantage que ceux des nitrates, reflétant sans doute alors mieux que ces derniers l’activité de la maladie.

Dans les tissus, en cas de colite aiguë, l’évolution des taux des composés S- et N-nitrosés semble à peu près corrélée avec celle du DAI. Mais, encore bizarrement, dans tous les organes, côlon y compris, les taux de nitrite évoluent en sens inverse de l’activité de la maladie; ils baissent quand elle s’intensifie. Par contre, pendant la phase inflammatoire, les taux tissulaires de nitrate subissent peu de changements. Ainsi, dans les tissus, aucune des mesures des taux des dérivés du NO ne permet une appréciation vraiment fidèle du degré de l’inflammation colique, que celle-ci soit aiguë ou chronique.

La troisième constatation surprenante concerne plus précisément les ions nitrite. Leurs taux sont, en effet, susceptibles d’évoluer différemment selon qu’ils sont évalués dans le plasma ou dans un organe, le côlon par exemple. Ainsi, du 3ème au 7ème jour d’induction de la colite aiguë, les taux de nitrite continuent à s’élever dans le plasma alors qu’ils s’effondrent dans le côlon. Cette dissociation des taux des nitrites entre les espaces intra- et extravasculaires (compartmentalization between intra- et extravascular space) semble signifier qu’au cours de la réponse inflammatoire ces anions sont soumis à un certain nombre de phénomènes dont nous ignorons encore la nature et qu’il reste à identifier (seems  to imply that this anion is under the control of yet unidentified mechanisms that are activated as part of the inflammatory response). A titre d’hypothèse, il pourrait, par exemple, s’agir de mécanismes en lien avec l’hypoxie tissulaire connue pour accompagner le processus inflammatoire.

Au vu de cette "étude dynamique", il est désormais légitime de considérer que le métabolisme du NO est fort complexe et que les taux de ses métabolites ne sont pas des reflets toujours aussi fidèles de l’activité de la NO-synthase qu’on aurait pu initialement le penser.

Commentaire du blog

Cette étude semble importante. Elle inaugure un nouveau chapitre de la science du NO, celui de l’évolution au cours du temps de ses métabolites, à la fois dans le plasma et dans de multiples organes, à l’occasion de tel ou tel phénomène physiologique ou pathologique. On peut attendre de ce genre d’étude des grands progrès dans la compréhension des mécanismes complexes mis en jeu.  

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