NOx sérique et cancer oesogastrique

Kishikawa, H., Nishida, J., Ichikawa, H., Kaida, S., Matsukubo, T., Miura, S., Morishita, T. and Hibi, T. (2011) Serum nitrate/nitrite concentration correlates with gastric juice nitrate/nitrite: a possible marker for mutagenesis of the proximal stomach. Nutrition 84, 62-69.

(voir l'abstract ici)

On sait qu’au cours du cycle entérosalivaire des nitrates, les nitrates plasmatiques sont activement sécrétés dans la salive. Il apparaît donc tout à fait légitime de supposer qu’une corrélation positive puisse unir les concentrations des nitrates et nitrites [NOx] dans le sérum et dans le liquide gastrique. C’est ce que les auteurs japonais cherchent ici à vérifier.

Chez 176 patients qui, après 12 heures de jeûne, sont l’objet d’une fibroscopie gastrique, les auteurs procèdent à une mesure conjointe des taux de NOx dans le sérum et dans le liquide gastrique. Quel que soit le pH gastrique, ils observent une corrélation positive entre les taux de NOx dans le sérum et les taux de NOx dans liquide gastrique, tout en faisant remarquer que, dans leur étude, le coefficient de corrélation, entre les deux variables, reste relativement faible [(the) relatively low correlation coefficient of serum and gastric juice nitrate/nitrite concentration in this study].

Comme les concentrations intragastriques de NOx et de NO évoluent proportionnellement, et que certaines hypothèses pathogéniques ont pu faire jouer un rôle au NO dans la pathogénie des cancers de la jonction oesogastrique, les auteurs proposent, dans leur conclusion, que le dosage des nitrates et nitrites [NOx] dans le sérum devienne un marqueur adapté au dépistage des cancers gastriques proximaux [In conclusion, it might possible to use serum nitrate/nitrite concentration as a biological marker for mutagenesis at the proximal stomach that has not been detected noninvasively by appropriate serum markers].

Commentaire du blog

La conclusion des auteurs, exprimée dans le titre, n’est pas recevable.

Pour étayer leur hypothèse, il aurait fallu qu’ils sélectionnent des patients atteints de cancer gastrique proximal, ou de cancer de la jonction œsogastrique, et qu’ils montrent qu’effectivement, chez de tels patients, les taux sériques de nitrate et de nitrite [NOx] à jeun sont statistiquement supérieurs à ce qu’ils sont chez les sujets témoins. Ce qu’ils n’ont pas fait.

Puis il aurait fallu qu’ils expliquent à partir de quel taux sérique de NOx à jeun un risque de développement d’un cancer de la jonction oesogastrique apparaît réellement. La notion de seuil manque dans l’article. Par ailleurs, on le sait, le taux sérique de nitrate augmente après le repas, restant élevé dans les minutes et les heures qui le suivent. Douze heures après le repas, le taux sérique de nitrate est, depuis longtemps, revenu à sa valeur de base. Après douze heures de jeûne, le taux sérique de nitrate est ainsi indépendant des apports alimentaires. Il ne reflète que la synthèse endogène des nitrates par la voie de la L-arginine, ou voie de la NO synthase.

On sait que cette synthèse endogène des nitrates est particulièrement forte lors des activités sportives et lors des séjours en haute altitude. Les Tibétains, vivant à 4200 mètres d’altitude, ont, en permanence, des taux sériques de nitrate 10 fois supérieurs à ceux des sujets qui vivent au bord de la mer (Erzurum et coll., 2007) [Cf. rubrique du 30 octobre 2009]. Si l’hypothèse des auteurs était exacte, il faudrait déconseiller un sport professionnel comme le cyclisme, ou le séjour prolongé en altitude, en raison du risque carcinologique. A l’inverse, si le sport professionnel et le séjour en altitude ne sont pas sources de cancer, l’hypothèse des auteurs peut être considérée comme erronée.

This entry was posted in Grief carcinologique, Taux de nitrates dans l'organisme, Taux de nitrites dans l'organisme and tagged , , , , , , , , , , , , , , , , , . Bookmark the permalink.

Comments are closed.