COVID-19, altitude, oxyde nitrique

Arias-Reyes, C., Zubieta-DeUrioste, N., Poma-Machicao, L., Aliaga-Raduan, F., Carvajal-Rodriguez, F., Dutschmann, M., Schneider-Gasser, E.M., Zubieta-Calleja, G. and Soliz, J. (2020) Does the pathogenesis of SARS-CoV-2 virus decrease at high-altitude ? Respiratory Physiology and Neurobiology277, 103443

(voir l'abstract et le texte entier ici)

Des auteurs canadiens, boliviens, australien et suisse se penchent sur la fréquence de l’infection COVID-19 au Tibet, ainsi que dans les régions boliviennes et équatoriennes de haute altitude. Ils la comparent à celle de la même infection virale dans les régions voisines de basse altitude.

 

• Dans les régions chinoises situées à plus de 3000 mètres d’altitude (Tibet, Qinghai, une partie du Sichuan), seuls 134 cas de COVID-19 ont été confirmés, la population totale y étant de 9 millions d’habitants. Par la route, la distance entre Lhassa, la capitale du Tibet, et Wuhan, le centre de l’épidémie, est certes de 3500 km. Mais les échanges par train, bus et voies aériennes ont pu rester importants [Lhasa and Wuhan are […] connected by train, bus, and by air, which indicates that tourist and commercial exchange bertween these cities may be considerable].

 

Une cohorte de 67 patients atteints par la COVID-19 dans la province de Sichuan a, en outre, montré que 54 % d’entre eux étaient asymptomatiques (ni toux, ni fièvre, ni céphalée). Moins de 10 % étaient fébriles. Aucun décès n’était enregistré.

 

• Dans les provinces boliviennes situées à plus de 3000 mètres d’altitude (La Paz, Oruro, Potosi, Chuquisaca) seuls 54 cas de COVID-19 ont été confirmés. La comparaison avec les provinces boliviennes de basse altitude, notamment avec la ville de Santa Cruz de la Sierra (altitude: 416 m), est marquante. En Bolivie, la fréquence de l’infection par la COVID-19 apparaît trois fois moins importante en haute qu’en basse altitude [In conclusion, it appears that Covid-19 infection rates at high altitude regions in Bolivia are approximately three-fold lower than lowlands].

 

• Des constatations analogues ont été faites en Équateur. A la date du 7 avril 2020, 722 cas d’infection par le COVID-19 ont été enregistrés dans les régions équatoriennes de haute altitude, (pour une population de 7.114.000 habitants), tandis que (pour une population de 8.328.000 habitants) 2943 cas d’infection par le COVID- 19 ont été répertoriés dans les régions équatoriennes de basse altitude, c’est-à-dire sur la côte. En Équateur, l’atteinte virale par le COVID-19 s’est avérée 4 fois moins fréquente dans les premières régions que dans les secondes [As of April 7th, four-fold less Covid-19 cases were in high-altitude areas of Ecuador (7,114,3000 inhabitants) with only 722 cases, compared to 2943 cases in the coastal regions (8,328,300 inhabitants)].

 

Pour tenter d’expliquer la diminution de la prévalence de l’infection par le coronavirus SARS-CoV-2 constatée en haute altitude, au-dessus de 3000 mètres, les auteurs énumèrent un certain nombre de facteurs hypothétiques:

- importants changements de température entre nuit et jour,

- sécheresse de l’air,

- haut index ultraviolet,

- possible diminution de l’expression de l’enzyme de conversion de l’angiotensine 2 [ACE2] sur les cellules endothéliales pulmonaires humaines, lorsque le sujet vit en haute altitude [a putative decrease of ACE2 expression in pulmonary endothelia in high-altitude inhabitant].

 

Commentaire du blog

 

L’infection par le COVID-19 est toujours en cours, notamment en Amérique du Sud. Les constatations définitives ne pourront être faites qu’à l’issue de la pandémie.

 

Malgré tout, dès à présent, les différences de prévalence de l’infection COVID-19 pour des régions géographiquement voisines et ne différant (apparemment) les unes des autres que par l’altitude, tant en Chine, qu’en Bolivie ou en Équateur, peuvent retenir l’attention.

 

Un possible mécanisme pathogénique n’a pas été cité par les auteurs. Il aurait mérité de l’être. C’est le rôle bénéfique éventuel de l’oxyde nitrique NO.

 

- Comme l’ont indiqué un certain nombre de rubriques récentes du blog «Nitrates et santé. Le blog des nitrates», plusieurs équipes cherchent actuellement à savoir si, délivré par inhalation, l’oxyde nitrique NO ne pourrait pas faire preuve d’efficacité clinique chez les patients soumis à l’infection COVID-19, et constituer un traitement à visée prophylactique et/ou curative. La rubrique du 25 mai 2020 recensait 11 études en cours. Les résultats sont en attente.

 

- Il convient de rappeler que, publiée il y a plus de 10 ans, une étude a montré des taux plasmatiques de nitrate NO3- dix fois plus élevés chez les Tibétains vivant à 4200 mètres d’altitude que chez les Américains vivant à 200 mètres d’altitude: en moyenne, 14,5 mg NO3- l-1 chez les premiers, 1,6 mg NO3- l-1 chez les seconds. Il sont aussi 5 fois plus élevés chez les femmes tibétaines que chez les femmes américaines: respectivement et en moyenne, 9.8 mg NO3- l-1 vs 1.9 mg NO3- l-1 [Erzurum et coll., 2007; rubrique du 30 octobre 2009].

 

Dans la même étude, les taux plasmatiques de nitrite sont, en moyenne et respectivement, de 220 et 500 μg NO2- l-1 chez les hommes et les femmes tibétains, alors qu’ils restent indétectables chez les Américains vivant à basse altitude.

 

L’adaptation à l’hypoxie d’altitude contribuerait ainsi à augmenter fortement la synthèse endogène en oxyde nitrique NO.

 

Si, comme il est vraisemblable, il existe un lien, en haute altitude, entre une forte synthèse endogène en oxyde nitrique NO et une faible prévalence de l’infection par le coronavirus SARS-CoV-2, c’est l’espoir thérapeutique placé en l’oxyde nitrique NO, notamment par inhalation (mais pas uniquement) qui se voit renforcé.




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