Le lac 227

Schindler, D.W., Hecky, R.E., Findlay, D.L., Stainton, M.P., Parker, B.R., Paterson, M.J., Beaty, K.G., Lyng, M. and Kasian, S.E.M. (2008) Eutrophication of lakes cannot be controlled by reducing nitrogen input: Results of a 37-year whole-ecosystem experiment. Proceedings of the National Academy of Sciences of the United States of America 105, 11254-11258.

(voir l'abstract et le texte ici)

Bien que notre blog soit consacré aux liens entre les nitrates et la santé, nous nous autorisons aujourd’hui à jeter un regard au-delà de notre domaine de prédilection, dans un domaine contigu : celui des liens entre les nitrates et l’environnement.

L’article de Schindler et coll. impressionne par sa force persuasive. Une équipe scientifique, comprenant huit canadiens et un américain, a conçu, mis au point et mené à terme une étude sur le terrain d’une durée peu commune. Commencée en 1969, achevée en 2005, elle a duré 37 ans.

Le champ d’investigation est un lac de 5 hectares, dénommé lac 227, situé dans le Nord-Ouest de l’Ontario (Canada). Ses profondeurs moyenne et maximale respectives sont de 4,5 et de 10 mètres.

Au cours des 21 premières années, de 1969 à 1990, le lac reçoit, à la fois, des apports azotés et phosphorés ; la biomasse de phytoplancton prolifère ; le lac devient « eutrophique ».

Pendant les 16 années suivantes, de 1990 à 2005, l’eau n’est plus fertilisée que par des apports phosphorés. Les apports azotés sont suspendus ; les apports phosphorés restent quantitativement identiques à ce qu’ils étaient les 21 années précédentes, de 1969 à 1990.

Bien que tout apport azoté ait ainsi secondairement cessé pendant 16 années consécutives, le lac reste toujours aussi « eutrophique ». En particulier, les cyanobactéries fixatrices d’azote atmosphérique (algues bleu-vert) profitent de la carence azotée du milieu liquide, résultant de ces nouvelles conditions expérimentales, pour proliférer.

En conclusion, les auteurs affirment que pour diminuer l’eutrophisation d’un lac, l’effort doit porter, non sur la diminution des apports azotés, mais, bien au contraire, sur la diminution des apports phosphorés.

En fin d’article, les auteurs se posent une question : « Les constatations faites sur les eaux douces du lac 227 sont-elles applicables aux estuaires, qui sont des milieux  salins, de salinité plus ou moins prononcée ? ». Ils ne répondent pas vraiment, continuant à s’interroger. Par prudence, ils se gardent d’extrapoler ; ils considèrent que, sur le sujet des estuaires, les données aujourd’hui à la disposition des scientifiques ne sont pas suffisamment étayées pour qu’il leur soit réellement possible de se forger une conviction définitive.

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