Nitrates alimentaires et cellules angiogéniques circulantes

Heiss, C., Meyer, C., Totzeck, M., Hendgen-Cotta, U.B., Heinen, Y., Luedike, P., Keymel, S., Ayoub, N., Lundberg, J.O., Weitzberg, E., Kelm, M. and Rassaf, T. (2012) Dietary inorganic nitrate mobilizes circulating angiogenic cells. Free Radical Biology and Medicine 52, 1767-1772

(voir l'abstract ici)

Les travaux de Rehman et coll. (2003) ont montré l’existence, dans le courant circulatoire, de «progéniteurs endothéliaux» [«endothelial progenitor cells»]. Provenant de la moelle osseuse, ces cellules dérivent des monocytes et macrophages et ont pour propriété de sécréter des facteurs de croissance angiogénique. Appelées aussi «cellules angiogéniques circulantes» [«circulating angiogenic cells» (CACs)], elles peuvent être mobilisées sur des sites d’ischémie et compléter l’angiogénèse assurée par l’endothélium.

En cas d’altération endothéliale d’origine ischémique, ces cellules aident donc à la réparation et à l’entretien vasculaires [CACs have the ability to home to sites of ischemic damage and endothelial injury, where they can promote angiogenesis and endothelial repair].

Un facteur de risque cardiovasculaire comme le tabagisme réduit le nombre et l’activité des cellules angiogéniques circulantes. A l’inverse, l’arrêt de l’intoxication tabagique, ou encore la pratique d’exercices physiques et un traitement par statine, contribuent à favoriser la réparation endothéliale, par l’intermédiaire de la mobilisation de ces cellules [Primary and secondary preventive lifestyle interventions, including smoking cessation and exercise training, as well as statine therapy, have been shown to enhance endogenous endothelial repair mechanisms involving CAC mobilization]. D’ailleurs, chez le patient atteint de maladie coronarienne, un faible nombre de cellules angiogéniques circulantes constitue un facteur prédictif de complications cardiovasculaires.

Une équipe germano-suédoise [Université de Düsseldorf; Karolinska Institute de Stockholm] détermine par cytométrie de flux le nombre de cellules angiogéniques circulantes CD34+/KDR+ et CD133+/KDR+ chez 10 volontaires, sains et non-fumeurs. La mesure est faite avant toute ingestion. Elle est répétée 1 heure, 2 heures, 3 heures et 4 heures, soit après ingestion de placebo (sous forme d’eau seule), soit après ingestion de 9.3 mg NO3- kg de poids-1, c’est-à-dire de 650 mg NO3- pour un sujet de 70 kg (sous forme de nitrate de sodium).

Notons d’abord qu’évaluée à 0.8 mg NO3- l-1 avant toute ingestion, la teneur plasmatique moyenne en nitrate NO3- s’élève après l’ingestion nitratée, pour atteindre un maximum de 16.2 mg NO3- l-1 à la première heure. De même, évaluée à 1.01 μg NO2- l-1 avant toute ingestion, la teneur plasmatique moyenne en nitrite NO2- s’élève après l’ingestion nitratée, pour atteindre un maximum de 5.3 μg NO2- l-1 à la deuxième heure.

Avant toute ingestion, les pourcentages des cellules angiogéniques CD34+/KDR+ et CD133+/KDR+ au sein des cellules circulantes sont évalués, en moyenne et respectivement, à 0.042 et 0.008%. L’ingestion de placebo n’a pas sur ces chiffres de retentissement significatif. Par contre, une heure après l’ingestion nitratée, les mêmes pourcentages sont évalués, en moyenne et respectivement, à 0.071 et 0.015%. Ils ont donc augmenté de 70%. A la deuxième heure, les modifications persistent. A la quatrième heure, les nombres des cellules angiogéniques circulantes sont redevenus identiques aux nombres de départ.

Une étude complémentaire effectuée chez la souris et utilisant un «chélateur» du NO [NO scavenger] (le 2-(4-carboxyphenyl)-4,4,5,5-tetramethylimidazoline-1-oxyl-3-oxide, ou cPTIO), permet de reconnaître que la mobilisation de cellules angiogéniques circulantes déclenchée par l’ingestion de nitrate NO3- fait, en réalité, intervenir la circulation entérosalivaire des nitrates, la formation de nitrites salivaires, puis la libération d’oxyde nitrique NO. Le radical NO agit, tout particulièrement, dans la moelle osseuse, site hypoxique, où il favorise la libération dans la circulation sanguine des «cellules angiogéniques» [CACs] [Oral nitrate ingestion leads to an increase in circulating nitrite concentration which in turn can be converted to NO at hypoxic sites, e.g., the bone marrow].

Cet effet des nitrates alimentaires sur le nombre de cellules angiogéniques circulantes est potentiellement bénéfique [potentially beneficial]. Il vient s’ajouter aux autres effets bénéfiques cardiovasculaires précédemment décrits [The effects of inorganic nitrate on circulating CACs […] add to previously described cardiovascular effects of this anion].

Pour permettre une meilleure régénération endothéliale après lésion aiguë de l’endothélium, dans les suites d’une angioplastie par exemple, on pourrait imaginer qu’à l’avenir les stratégies thérapeutiques proposées comportent désormais, à titre adjuvant, des charges nitratées alimentaires [A dietary nitrate intervention may be an interesting way of facilitating endothelial regeneration as an adjuvant therapy in situations when acute endothelial injury occurs, e.g., after angioplasty].

This entry was posted in Effet bénéfique cardiovasculaire and tagged , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , . Bookmark the permalink.

Comments are closed.