Effets de 15 jours de supplémentation en nitrates

Vanhatalo, A., Bailey, S., Blackwell, J.R., DiMenna, F.J., Pavey, T.G., Wilkerson, D.P., Benjamin, N., Winyard, P.G. and Jones, A.M. (2010) Acute and chronic effects of dietary nitrate supplementation on blood pressure and the physiological responses to moderate-intensity and incremental exercise. American Journal of Physiology. Regulatory, Integrative and Comparative Physiology 299, R1121-R1131.

(voir l'abstract ici)

Depuis le travail de Larsen et coll. (2010), rapporté dans la rubrique du 4 décembre 2009, on sait que, chez l’adulte, la consommation en oxygène provoquée par un exercice physique d’intensité sub-maximale est significativement diminuée quand, les deux jours précédant l’exercice, on ajoute à l’alimentation quelque 400 mg de nitrates NO3- par jour.

L’expérience de Webb et coll. (2008), signalée dans les deux rubriques du 10 et du 28 septembre 2010, montre que l’ingestion d’une seule dose de 500 ml de jus de betterave, correspondant à une ingestion de 1395 mg de NO3-, fait, dans les heures qui suivent, baisser de façon significative les tensions artérielles systolique et diastolique.

Aucune étude jusqu’ici publiée sur ces effets bénéfiques des nitrates alimentaires ne s’étend sur une durée de plus de 4 à 6 jours. Les auteurs britanniques (University of Exeter, Royaume-Uni) proposent, chez 8 volontaires sains, une étude de 15 jours.

Les auteurs comparent les effets, pendant 15 jours, d’un régime comprenant 500 ml de jus de betterave par jour, apportant 322 mg de NO3- par jour, à ceux d’un régime placebo. Des exercices physiques, d’abord d’intensité modérée, puis d’intensité croissante, sont effectués 2 heures et demie après la première ingestion; ils sont répétés les cinquième et quinzième jours.

Comparativement aux résultats obtenus chez les sujets dont l’alimentation n’est pas modifiée, les taux plasmatiques en nitrite NO2- des sujets dont l’alimentation est supplémentée en nitrates sont augmentés; leurs tensions artérielles systolique et diastolique sont diminuées. Les taux plasmatiques en nitrite sont augmentés, en moyenne et respectivement, de 39%, 25% et 46% à 2.5 heures, J5 et J15. Les tensions artérielles systolique et diastolique sont diminuées d’environ 4% tout au long des 15 jours de l’expérimentation.

Par ailleurs, au cours des exercices modérés, la consommation d’oxygène en état stable [steady-state VO2] est réduite d’environ 4% tout au long des 15 jours. Lors des efforts intensifs, à J15, la consommation maximale d’oxygène [VO2 max] est augmentée d’un coefficient de 4%.

La consommation de nitrates, disent les auteurs, est l’objet de limitations règlementaires dans de nombreux pays en raison de liens supposés entre les dérivés des nitrates et nitrites d’origine alimentaire, via leur conversion en N-nitrosamines, et l’apparition de cancers chez des animaux de laboratoire. La justification de cette restriction réglementaire est remise en cause depuis  la mise en évidence des effets bénéfiques des fruits et légumes riches en nitrates [The use of pharmacological sodium nitrate is regulated in many countries as a result of some earlier reports of a link between foods containing nitrate and nitrite (via conversion to N-nitrosamines) and cancer in laboratory animals. This restriction has been questioned by more recent findings elucidating the benefits of nitrate-rich fruits and vegetables in the diet].

Comme le montre cette étude, les effets favorables sur la tension artérielle et l’amélioration de la tolérance à l’exercice induits par les apports alimentaires en nitrates ne s’observent pas uniquement au cours des premières heures ou des tout premiers jours de l’expérience. Pour peu que la supplémentation en nitrates soit poursuivie, ils continuent à être observés au moins jusqu’au quinzième jour [These results indicate that dietary  NO3- supplementation acutely reduces blood pressure and the O2 cost of submaximal exercise and that these effects are maintained for at least 15 days if supplementation is continued].

De telles indications pourraient déboucher à la fois sur de meilleures adaptations à l’effort pour les athlètes et les sportifs et une meilleure santé cardiovasculaire pour la population générale [These results provide intriguing new direstions for the potential use of dietary nitrate in enhancing training adaptations in athletic populations and improving cardiovascular health within the wider population].

Commentaire du blog

Dans les deux études, celle de Webb et coll. (2008) et celle-ci de Vanhatalo et coll. (2010), les sujets ingèrent 500 ml de jus de betterave. On voit que les apports correspondants en nitrates sont fort différents: respectivement 1395 et 322 mg de NO3-. La teneur en nitrates des jus de betterave utilisés est très dissemblable: 2790 mg NO3- l-1 dans la première, 645 mg NO3- l-1 dans la seconde.

La raison pour laquelle les autorités officielles ont établi une réglementation à l’égard des nitrates alimentaires n’est pas exactement celle que les auteurs avancent. Comme plusieurs rubriques précédentes (19 février, 24 avril, 11 mai 2010) ont eu l’occasion de le mentionner, la seule raison qui conduit encore aujourd’hui l’OMS à fixer une limite réglementaire de 50 mg NO3- l-1 dans l’eau de boisson, notamment l’eau d’adduction publique, est le risque de méthémoglobinémie infantile [«The guideline value for nitrate in drinking-water is established solely to prevent methaemoglobinaemia, which depends on the conversion of nitrate to nitrite» (OMS, 1993)]; pour l’eau d’adduction publique, cette raison n’est pas scientifiquement justifiée.

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