Nitrates alimentaires et couplage neurovasculaire

Aamand, R., Dalsgaard, T., Lynn Ho Y.-C., Moller, A., Roepstorff and Lund, T. (2013) A NO way to BOLD?: Dietary nitrate alters the hemodynamic response to visual stimulation. NeuroImage 83, 397-407

(voir l'abstract ici)

L’extraction d’oxygène du sang vers la cellule nerveuse cérébrale est majorée lors de l’activité neuronale. L’organisme réagit par ce qu’on nomme un «couplage neurovasculaire». Une vasodilatation accroît le débit sanguin local. L’augmentation du débit sanguin local répond aux besoins accrus en oxygène. Dans la zone activée, la concentration en déoxyhémoglobine se trouve diminuée. Comme on le sait, la déoxyhémoglobine a un effet paramagnétique. Dès lors, on enregistre localement, en IRM fonctionnelle, une augmentation du signal en pondération T2.

Le signal dépendant du niveau d’oxygénation cérébrale porte le nom de signal BOLD [Blood-Oxygen-Level Dependent Signal]. Décalé dans le temps, il survient quelques secondes après le déclenchement de l’activité neuronale.

On a montré qu’à l’origine du «couplage neurovasculaire» intervient une production d’oxyde nitrique NO par la voie endogène de la NO synthase. Les auteurs danois [Université d’Aarhus, Jylland oriental] cherchent à savoir si la production d’oxyde nitrique NO par l’autre voie, c’est-à-dire par la voie nitrate alimentaire-nitrite-NO, serait capable ou non d’influencer, de même, la réponse hémodynamique locale à la stimulation neuronale.

20 sujets en bonne santé de sexe masculin, âgés en moyenne de 25 ans, participent à l’étude.

Pendant trois jours consécutifs, ils ingèrent une boisson contenant

- soit du chlorure de sodium NaCl, à titre de témoin,

- soit du nitrate de sodium Na NO3. L’ingestion est alors de 6.2 mg NO3- kg-1 j-1, soit, pour un poids moyen de 77 kg, en moyenne, de 470 mg NO3- j-1.

Le troisième jour, des stimuli visuels sont utilisés pour déclencher l’activité neuronale. Il s’agit d’anneaux concentriques en expansion ou contraction, centrés sur un point de fixation.

Avant le premier jour, la concentration plasmatique en nitrate NO3- de l’ensemble des sujets est, en moyenne, de 1.47 mg NO3- l-1. Chez les sujets témoins, aucune modification significative de la concentration plasmatique en nitrate NO3- n’est enregistrée: elle reste, en moyenne, à 1.26 mg NO3- l-1. Chez les sujets qui ingèrent la boisson riche en nitrate NO3-, la concentration plasmatique en nitrate s’élève, en moyenne, jusqu’à 5.55 mg NO3- l-1.

• Le décalage temporel entre la stimulation visuelle et le signal BOLD est évalué:

- chez les sujets témoins, en moyenne, à 4.35 secondes

- chez les sujets ayant ingéré une boisson riche en nitrate NO3-, en moyenne, à 4.05 secondes.

Ainsi, les apports en nitrate NO3- se traduisent par une diminution moyenne du décalage temporel entre la stimulation neuronale et la réponse hémodynamique locale de 7% [The main effect of the increased nitrate intake was thus a mean decrease in the hemodynamic lag of 7.0 ± 2%].

• L’amplitude du signal BOLD lui-même est évaluée:

- chez les sujets témoins, en moyenne, à ~ 2.3 %

-chez les sujets ayant ingéré une boisson riche en nitrate NO3-, en moyenne, à ~ 2.1 %.

La différence est significative, d’environ 7.9 % [This translated into a mean decrease in the BOLD amplitude of 7.9 ± 4 % at high nitrate intake compared to when nitrate intake was minimized].

Pour la première fois dans la littérature, les auteurs démontrent que les apports alimentaires en nitrate NO3- modulent la réponse hémodynamique cérébrale locale aux stimuli. [This is the first study to show that dietary nitrate intake, in amounts comparable to that of a large plate of salad, is a modulator of the hemodynamic response to visual stimuli in the human visual cortex]. La réponse BOLD devient à la fois plus rapide et plus faible […a faster and smaller BOLD response…], ce qui serait alors doublement bénéfique.

On pourrait envisager qu’une alimentation enrichie en nitrate soit ainsi en mesure de faciliter la communication entre les neurones et la microvascularisation locale, permettant à cette dernière de réagir plus rapidement et plus harmonieusement à l’activité neuronale.

Si le fait se vérifie, il ne serait pas sans implications cliniques et thérapeutiques, notamment chez les patients souffrant de dysfonction cérébrovasculaire [If nitrate intake could be proven to facilitate the communication between neurons and the microvasculature, this could be an important finding with respect to diseases relating to cerebrovascular dysfunction, as well as affordable treatment options].

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