Nitrate, nitrite et œsophage

Ito, H., Iijima, K., Ara, N., Asanuma, K., Endo, H., Asano, N., Koike, T., Abe, Y., Imitani, A. and Shimosegawa, T. (2010) Reactive nitrogen oxide species induce dilatation of the intercellular space of rat esophagus. Scandinavian Journal of Gastroenterology 45, 282-291.

(voir l'abstract ici)

Lorsqu’un patient est sujet à des reflux gastro-oesophagiens, la lésion oesophagienne qui apparaît le plus précocement semble consister en une dilatation des espaces intercellulaires (DIS) de l’épithélium oesophagien, décelable en microscopie électronique (TEM).

Des études ex vivo ont montré que, chez le lapin, l’acidité du reflux peut, à elle seule, être à l’origine d’une telle lésion histologique.

Les auteurs, qui travaillent dans le service de gastro-entérologie de Sendai au Japon, ne confirment pas ces données dans une autre espèce, le rat. Leurs études ex vivo et in vivo montrent que, dans cette autre espèce, l’acidité (pH-1.5 HCl) n’est pas suffisante, à elle seule, pour déclencher une anomalie histologique oesophagienne détectable.

Mais si, dans leurs études ex vivo et in vivo, ils exposent l’épithélium oesophagien du rat non seulement à l’acidité (pH-1.5 HCl) mais aussi au nitrite de sodium (NaNO2), à des concentrations de 1.0 ou de 5.0 millimoles par litre, c’est-à-dire, pour l’ion nitrite, à des concentrations de 46 ou de 230 mg NO2- par litre, les auteurs constatent qu’alors l’espace intercellulaire de l’épithélium oesophagien s’accroît. Si, ex vivo, dans le groupe témoin, ce diamètre intercellulaire est, en moyenne, de 475 nanomètres (10-9 m), on observe que dans les groupes avec adjonction de nitrite à des concentrations de 46 et de 230 mg  NO2- par litre  il s’élargit nettement, atteignant des moyennes respectives de 650 et 800 nanomètres. Et alors qu’in vivo, dans le groupe témoin, il est, en moyenne, de 470 nanomètres, dans le groupe avec adjonction de nitrite à une concentration de 230 mg NO2- par litre il atteint, en moyenne, 620 nanomètres.

Les auteurs considèrent que, lors des reflux acides dans l’œsophage, les oxydes d’azote générés par l’acidification des nitrites salivaires pourraient ainsi jouer un rôle dans l’induction de la dilatation des espaces intercellulaires de l’épithélium oesophagien [The reactive nitrogen oxide species generated by the acidifcation of salivary nitrite in the presence of refluxed gastric acid in the esophagus could be a luminal factor that is responsible for the induction of DIS]

Mais, par honnêteté, ils signalent aussi une limite de leur étude [a limitation of this study]. Pour obtenir des modifications histologiques oesophagiennes détectables en microscopie électronique, il leur faut utiliser des concentrations en nitrite très élevées, d’au moins 46 mg NO2- par litre ex vivo et 230 mg NO2- par litre in vivo. De ce fait, il est difficile d’en déduire que, dans les conditions habituelles, les apports quotidiens en nitrates chez l’homme soient réellement suffisants, via leur transformation en nitrites salivaires, pour faire apparaître des lésions oesophagiennes débutantes, décelables en microscopie électronique [The clinical relevance of daily dietary intake of nitrate seems to be obscure].

Commentaire du blog

Pour aller dans le sens de la réserve exprimée par les auteurs, rappelons qu’après l’ingestion d’une dose relativement forte de 124 mg de nitrates NO3-, supérieure à l’ingestion quotidienne moyenne habituelle de 75 mg, les taux salivaires respectifs en nitrites NO2- dans la salive et le suc gastrique ne dépassent pas 12 et 5 mg par litre.

This entry was posted in Etude expérimentale, Grief carcinologique, Griefs and tagged , , , , , , , . Bookmark the permalink.

Comments are closed.