Effet antihypertenseur des nitrates et des nitrites

Ghosh, S.M., Kapil, V., Fuentes-Calvo, I., Bubb, K.J., Pearl,V., Milsom, A.B., Khambata, R., Maleki-Toyserkani, S., Yousuf, M., Benjamin, N., Webb, A.J., Caulfield, M.J., Hobbs, A.J. and Ahluwalia, A. (2013) Enhanced vasodilator activity of nitrite in hypertension: critical role for erythrocytic xanthine oxidoreductase and translational potential. Hypertension 61, 1093-1102.

suivi de: Tsikas, D., Schneider, J.Y. and Frölich, J.C. (2013) Antihypertensive inorganic nitrate and nitrite: What is the underlying mechanism? Hypertension 62. Sous presse.

(voir l'abstract de l'article de Ghosh et coll. ici)

(voir la référence de la lettre de Tsikas et coll. ici)

Chez le sujet sain, du moins à partir d’un certain seuil, une élévation de la concentration plasmatique en nitrite NO2- se traduit à la fois par une vasodilatation et une baisse de la tension artérielle. Par contre, les effets de l’élévation de la concentration plasmatique en nitrite NO2- chez le sujet déjà hypertendu restent à préciser [Elevation of circulating nitrite (NO2-) levels causes vasodilatation and lowers blood pressure in healthy volunteers. Whether these effects and the underpinning mechanisms persist in hypertension is unknown].

Les auteurs [Londres, Royaume-Uni; Salamanque, Espagne] présentent ici deux études:

- l’une chez le rat spontanément hypertendu,

- l’autre chez l’homme hypertendu de stade 1 [tension systolique > 140 et < 159 mm Hg; tension diastolique > 90 et < 99 mm Hg], encore indemne de traitement antihypertenseur.

• A) Chez le rat, ils comparent les effets sur la tension artérielle d’une dose de nitrite, administrée par voie intraveineuse, allant de 0.05 à 1.38 mg NO2- kg-1 (sous forme de nitrite de potassium)

- d’une part, chez le rat témoin Wistar Kyoto (n=6),

- d’autre part, chez le rat spontanément hypertendu (SHR) (n=8).

Tandis que, chez le rat témoin, la baisse tensionnelle reste faible, chez le rat spontanément hypertendu, elle s’avère marquée. Elle devient appréciable dès l’administration d’une dose de 0.14 mg NO2- kg-1. Avec la dose la plus forte employée dans l’étude, 1.38 mg NO2- kg-1, qui élève la concentration plasmatique en nitrite, en moyenne, à 14 μg NO2- l-1; la tension artérielle systolique chute, en moyenne:

- de 6.3 mm Hg chez le rat témoin,

- de 32.0 mm Hg chez le rat spontanément hypertendu.

Chez le rat spontanément hypertendu, la baisse tensionnelle provoquée par le bolus de nitrite apparaît, par ailleurs, inhibée par l’administration préalable de 50 mg d’allopurinol kg-1, l’allopurinol étant un inhibiteur de la xanthine oxydoréductase [XOR]. Les auteurs montrent, en outre, que l’enzyme réduisant le nitrite en NO siège dans le globule rouge, non dans la paroi vasculaire [This effect was virtually abolished by the xanthine oxidoreductase (XOR) inhibitor, allopurinol, and associated with hypertension-specific XOR-dependent nitrite reductase activity localized to the erythrocyte but not the blood vessel wall].

• B) Chez l’homme atteint d’hypertension débutante (7 sujets de sexe masculin, 8 sujets de sexe féminin), ils administrent par voie orale 217 mg de nitrate NO3-, sous forme de jus de betterave concentré. Cette dose relativement faible de nitrate NO3- élève la concentration plasmatique en nitrite NO2- d’environ 50%. L’élévation est insuffisante pour exercer un effet hypotensif chez le sujet non hypertendu, comme il ressort d’une étude précédente réalisée par la même équipe [rubriques des 28 09, 01 et 05 10 2010] [To determine whether these pathways translate to human hypertension, we investigated the effects of elevation of circulating nitrite levels in 15 drug naïve grade 1 hypertensives. To elevate nitrite, we used a dose of dietary nitrate (~3.5 mmol) that elevated nitrite levels ~1.5 fold; a rise shown previously to exert no significant blood pressure-lowering effects in normotensives].

Alors que, chez le sujet normotendu, cette dose orale de nitrate est ainsi sans effet tensionnel évident, chez le sujet atteint d’hypertension débutante, elle entraîne une assez nette baisse de la tension artérielle systolique, en moyenne de 11.2 mm Hg entre la 3ème et la 6ème heures; sous son effet, la tension artérielle diastolique baisse également, de manière cependant un peu moins prononcée, le pic de baisse étant en moyenne de 9.6 mm Hg.

L’étude est à retenir. Chez l’animal comme chez l’homme, l’effet hypotenseur de l’ion nitrite NO2- apparaît plus marqué lorsque la tension artérielle de base est élevée que lorsqu’elle est normale. Si, à l’avenir, le fait se confirme, les implications thérapeutiques sont énormes [In summary, we have demonstrated that nitrite is more potent at reducing blood pressure in hypertensive animals and patients than in normotensives […] Given that ~50 % of treated hypertensive subjects fail to achieve their target blood pressure, an additional strategy, based on intake of nitrate-rich vegetables, may prove to be cost-effective, easily achievable, safe, and favorable to public health. Our proof-of-principle study highlights the imperative to ascertain this potential in patients].

Dans une lettre à la revue “Hypertension”, Tsikas et coll. [Hanovre, Allemagne] ne contestent pas ce point. Ils font cependant part de leur perplexité devant le rôle que les auteurs de l’étude font jouer à la xanthine oxydoréductase érythrocytaire. La réduction de l’ion nitrite NO2- en NO sous l’effet de la xanthine oxydoréductase [XOR] réclamerait des conditions anaérobies, conditions non réalisées dans le globule rouge [But because NO2- reduction to NO by XOR requires anaerobic conditions, XOR is unlikely to generate NO from NO2- in erythrocytes]. Pour les rédacteurs de la lettre, le mécanisme exact expliquant la réduction NO2--NO reste à découvrir.

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